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Sahara occidental : Le Maroc accentue sa répression face aux observateurs internationaux

Dans une nouvelle démonstration de sa politique d’isolement et de répression au Sahara occidental, le Maroc a une fois de plus empêché des observateurs internationaux d’accéder aux territoires occupés. Cette fois-ci, ce sont trois eurodéputés qui en ont fait les frais, illustrant l’escalade préoccupante de la stratégie marocaine visant à dissimuler ses violations des droits humains au Sahara occidental occupé.

La parlementaire espagnole Isabel Serra Sanchez du parti Podemos, le parlementaire finlandais Teusi Saramo du parti Vasimisto et la parlementaire portugaise Catarina Martins du parti Bloco de Esquerda se sont vu refuser l’entrée à Laâyoune ce jeudi, dans ce qui constitue un nouvel épisode d’une longue série d’expulsions systématiques. « Notre détention illégale nous empêche d’accomplir notre travail en tant qu’euro-députés », ont-ils protesté, soulignant qu’ils étaient venus « en mission pour suivre l’application de l’arrêt européen annulant les accords d’agriculture et de pêche entre l’Union européenne et le Maroc, car ce dernier exploite les ressources du peuple sahraoui ». Cette politique d’obstruction systématique s’inscrit dans une tendance inquiétante qui s’est significativement intensifiée depuis le début de l’année 2025. Les chiffres sont éloquents : depuis 2014, plus de 311 ressortissants étrangers de 28 pays différents se sont vu interdire l’accès aux territoires occupés. La Norvège et l’Espagne figurent en tête des pays les plus touchés, avec respectivement 133 et 105 expulsions, témoignant de l’ampleur de cette politique de verrouillage. Le cas récent du journaliste espagnol Asier Aldia Esnaola et du blogueur hispano-suisse Ramila de Aventura est particulièrement révélateur. Arrêtés à l’aéroport Mohammed V de Casablanca après une visite à Dakhla occupée, ils ont été contraints de retourner à Madrid alors qu’ils devaient enquêter sur la disparition du militant sahraoui Lahbib Agrichi, dont les forces d’occupation sont accusées d’être responsables. Cette stratégie de black-out ne se limite pas aux expulsions individuelles. Sept organisations internationales, parmi lesquelles Avocats sans Frontières (Belgique) et Friedrich Naumann Stiftung (Allemagne), se sont vu interdire toute activité liée à la défense des droits humains dans la région. Une mesure qui témoigne de la volonté manifeste du Maroc d’étouffer toute surveillance indépendante de ses actions dans le territoire occupé.

La mobilisation internationale se renforce

Face à cette situation, la mobilisation internationale s’intensifie. Le Front Polisario a vivement réagi en appelant l’Union européenne à déposer une plainte officielle contre le Maroc et à prendre des mesures concrètes pour garantir la liberté de mouvement de ses représentants. Le Collectif des défenseurs sahraouis des droits humains au Sahara occidental (CODESA) a également condamné avec force cette politique d’isolement, dénonçant la tentative marocaine de maintenir un blocus informationnel total. La Commission sahraouie des droits de l’homme pointe quant à elle du doigt l’impunité dont bénéficie le Maroc, tout en fustigeant « la poursuite de sa politique répressive contre toute voix sahraouie revendiquant la liberté, la dignité et l’indépendance ». Une analyse partagée par l’Association de la jeunesse sahraouie en France, qui exige la levée immédiate du blocus imposé aux territoires occupés, actuellement soumis à un strict quadrillage militaire et sécuritaire. Les organisations internationales de défense des droits humains, telles que Human Rights Watch et Amnesty International, ont également sonné l’alarme face à ces entraves systématiques à la surveillance indépendante. La Fondation Carter a notamment signalé une intensification des persécutions contre les défenseurs des droits humains, tandis que Free Press Unlimited a mis en lumière les graves atteintes à la liberté de la presse, empêchant les journalistes d’exercer leur mission d’information sur le terrain.

Cette escalade répressive intervient dans un contexte marqué par l’annulation décidé par la Cour de justice de l’Union européenne récente des accords commerciaux entre l’UE et le Maroc concernant le Sahara occidental. Le parti espagnol SUMAR a d’ailleurs appelé son gouvernement à demander des explications au Maroc concernant l’expulsion des parlementaires, qualifiant l’action marocaine d' »extrêmement dangereuse », d’autant plus qu’il s’agissait d’une visite officielle dont le ministère avait été informé à l’avance. Paradoxalement, cette politique d’isolement et de répression semble produire l’effet inverse de celui recherché par Rabat. Au lieu d’étouffer la cause sahraouie, elle contribue à renforcer la mobilisation internationale en sa faveur. Les organisations sahraouies appellent désormais la communauté internationale à intensifier son soutien en faveur du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, insistant sur l’importance cruciale de multiplier les visites et les enquêtes internationales pour documenter la réalité sur le terrain et contrer la stratégie marocaine d’étouffement de l’information. Face à ce durcissement de la répression et aux violations continues des droits humains, la question du Sahara occidental s’impose plus que jamais comme un enjeu majeur pour la communauté internationale. Le déni persistant du Maroc et son mépris croissant pour la légalité internationale ne font que souligner l’urgence d’une solution politique conforme au droit international et aux résolutions des Nations Unies.

Lyes Saïdi

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