Lutte contre le financement du terrorisme : L’Algérie renforce son dispositif
L’Algérie vient de consolider sa stratégie de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Le Premier ministre Nadir Larbaoui a signé le décret exécutif n° 25-101 daté du 12 mars qui établit de nouvelles procédures pour le gel et la saisie des fonds liés au terrorisme et à la prolifération des armes de destruction massive. Ce texte, publié dans la dernière livraison du Journal officiel et qui abroge un précédent décret de novembre 2023, s’inscrit dans une démarche d’alignement aux standards internationaux et aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. Le dispositif mis en place repose sur un principe d’action immédiate. Dès qu’une personne ou une entité est inscrite sur la liste récapitulative des sanctions établie par le Conseil de sécurité de l’ONU, les autorités algériennes et les institutions financières disposent d’un délai maximum de 24 heures pour procéder au gel de ses avoirs. Cette célérité vise à empêcher tout transfert ou mouvement de fonds qui pourrait servir à financer des activités terroristes. La Cellule de traitement du renseignement financier (CTRF) joue un rôle central dans ce nouveau dispositif. En tant qu’organe spécialisé, elle est chargée de publier sur son site web officiel la liste des personnes et entités sanctionnées et d’informer immédiatement les institutions concernées. Les banques, établissements financiers et autres entités assujetties sont tenus de s’inscrire sur ce site et de fournir une adresse électronique pour recevoir les notifications en temps réel.
Le décret instaure un système de vigilance permanente. Les institutions financières doivent vérifier en continu si leurs clients figurent sur la liste des sanctions. Cette obligation s’étend à toutes les nouvelles relations d’affaires et aux transactions occasionnelles. En cas de correspondance, les fonds doivent être immédiatement gelés et la CTRF informée sans délai.
Les mesures prises ne se limitent pas au gel des avoirs. Le texte prévoit également l’interdiction de toute activité pour les personnes et entités inscrites sur la liste des sanctions, y compris la fermeture de leurs locaux et l’interdiction de leurs réunions. Pour les associations, cela se traduit par une suspension de leurs activités, voire leur dissolution par décision judiciaire.
L’interdiction de voyager constitue un autre volet important du dispositif. Les personnes inscrites sur la liste des sanctions se voient retirer leur passeport et interdire la délivrance d’un nouveau document de voyage pendant toute la durée de leur inscription. Cette mesure s’applique également aux membres des entités terroristes inscrites et peut comprendre le refus d’entrée sur le territoire national pour les étrangers concernés.
Le décret prévoit néanmoins des exceptions humanitaires. Les personnes dont les avoirs sont gelés peuvent demander l’autorisation d’utiliser une partie de ces fonds pour couvrir leurs besoins essentiels (alimentation, loyer, soins médicaux) ou des dépenses exceptionnelles. Ces demandes sont examinées par le ministre des Finances après avis des organes compétents du Conseil de sécurité.
Le texte accorde une attention particulière aux droits des tiers de bonne foi, définis comme des personnes n’ayant pas fait l’objet d’enquête ou de poursuite pour les faits ayant entraîné l’inscription sur la liste des sanctions et dont le titre de propriété est régulier et licite.
Un régime de contrôle rigoureux est mis en place. Les autorités de régulation doivent soumettre un rapport semestriel à la CTRF sur les résultats de la surveillance de la mise en œuvre des obligations par les institutions assujetties. Ces dernières sont tenues d’établir des procédures internes pour se conformer rapidement aux exigences du dispositif et interdire à leurs employés d’informer leurs clients des mesures prises à leur encontre.
Les contrevenants s’exposent aux sanctions prévues par la loi n° 05-01 du 6 février 2005 relative à la prévention et à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.
Ce renforcement du cadre juridique algérien traduit la volonté du pays de s’aligner sur les normes internationales en matière de lutte contre le financement du terrorisme et le blanchiment d’argent, notamment les recommandations du Groupe d’action financière (GAFI). Il témoigne également de l’engagement de l’Algérie à respecter ses obligations internationales dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies.
Amar Malki