Enseignement de tamazight à l’école : Le HCA plaide pour une révision de la loi d’orientation de l’éducation nationale
Quinze ans après la promulgation de la loi d’orientation sur l’éducation nationale, le statut de tamazight dans le système scolaire algérien fait débat. Le secrétaire général du Haut Commissariat à l’amazighité Si El Hachemi Assad a plaidé dimanche pour une révision en profondeur de la loi 08-04 du 23 janvier 2008, estimant que le caractère facultatif de l’enseignement de cette langue constitutionnelle freine son développement et sa promotion à l’école. Lors d’une intervention sur les ondes de la Radio algérienne, M. Assad s’est montré nuancé dans son bilan, reconnaissant les avancées tout en pointant les obstacles structurels qui persistent. « Nous avons réalisé une avancée majeure par rapport à l’enseignement de tamazight. Toutefois, il reste beaucoup à faire et à parfaire parce que tout est lié à la loi régissant cet enseignement », a-t-il déclaré. Cette analyse s’appuie sur les statistiques fournies par le ministère de l’Éducation nationale, qui montrent une progression constante du nombre de candidats optant pour les épreuves de tamazight au BEM et au Baccalauréat. Cette évolution positive témoigne d’un intérêt croissant des élèves et des familles pour cette langue, mais reste tributaire du cadre réglementaire actuel.
Le responsable du HCA pointe du doigt une contradiction fondamentale entre la Constitution, qui reconnaît tamazight comme langue nationale et officielle depuis 2016, et la loi d’orientation éducative qui maintient son enseignement dans un statut facultatif. « L’aspect facultatif est en défaveur avec la promotion de tamazight à l’école et n’assure pas la continuité pédagogique de cet enseignement », a-t-il regretté. Cette discontinuité pédagogique constitue selon lui un obstacle majeur à l’épanouissement de l’enseignement de tamazight, privant les élèves d’une progression cohérente dans l’apprentissage de cette langue. Au cœur de ses préoccupations figure l’article 34 de la loi 08-04, qui conditionne l’enseignement de tamazight à l’existence d’une « demande sociale ». M. Assad dénonce cette formulation qu’il juge « piégeante », estimant qu’elle place cette constante constitutionnelle dans une position de subordination par rapport aux autres matières du programme scolaire. Cette approche à la demande contraste avec le statut officiel reconnu à tamazight par la loi fondamentale du pays, créant une incohérence juridique que le HCA souhaite voir résolue.
La vision portée par le secrétaire général du HCA dépasse la simple révision législative pour embrasser une stratégie globale de généralisation. « Nous souhaitons voir l’élaboration d’un plan généralisant l’enseignement de tamazight, un engagement de l’État pour généraliser l’enseignement de tamazight à tous les niveaux, c’est-à-dire, les trois paliers », a-t-il déclaré. Cette ambition s’inscrit dans une démarche prospective que le HCA a matérialisée par l’élaboration d’un mémorandum détaillé. Ce document technique présente les différentes hypothèses de généralisation et établit un calendrier prévisionnel pour étendre l’enseignement de tamazight aux paliers primaire, moyen et secondaire. Le mémorandum évoqué par M. Assad constitue un outil de plaidoyer auprès des décideurs politiques, démontrant la faisabilité technique et pédagogique d’une généralisation progressive de l’enseignement de tamazight. Cette approche méthodique vise à transformer une revendication culturelle en projet éducatif structuré, susceptible de s’intégrer dans les politiques publiques d’éducation.
L’intervention de Si El Hachemi Assad s’inscrit dans un moment charnière pour l’éducation algérienne, marqué par les réformes en cours et la digitalisation du secteur. La question du statut de tamazight illustre les défis d’adaptation du système éducatif aux évolutions constitutionnelles et sociétales du pays. La révision de la loi 08-04 réclamée par le HCA pourrait ainsi s’inscrire dans le cadre plus large des réformes éducatives en cours.
Salim Amokrane
