Une exposition collective au Palais de la Culture Moufdi-Zakaria : Une centaine d’œuvres pour raconter Ghaza
Le Palais de la Culture Moufdi-Zakaria d’Alger accueille jusqu’au 15 août une exposition collective d’envergure qui transforme la douleur en couleurs et la tragédie en création artistique. « De sous les décombres, Ghaza en couleurs » rassemble plus de cent œuvres signées par trente-six artistes plasticiens algériens, témoignage vibrant d’une solidarité qui transcende les frontières géographiques pour toucher au cœur de l’humanité. Inaugurée jeudi dernier par le ministre de la Culture et des Arts, Zouhir Ballalou, cette exposition transforme la galerie Baya en un espace de recueillement et de résistance créative, où chaque toile devient un cri silencieux face à l’indicible. L’initiative, fruit d’une année de préparation selon l’artiste Samir Galbi, illustre avec une force saisissante comment l’art peut devenir le langage universel de la compassion et de l’indignation. Les créateurs, venus des quatre coins du pays, ont puisé dans leur palette émotionnelle pour traduire visuellement ce que les mots peinent à exprimer. Le ministre Ballalou a souligné que « ces œuvres expriment avec spontanéité et sincérité l’importance et la place qu’occupe la cause palestinienne dans le cœur des Algériens ainsi que la position claire et immuable de l’Algérie en soutien à la cause palestinienne ». Cette exposition constitue ainsi bien plus qu’un simple événement culturel ; elle devient le miroir d’une conscience collective algérienne profondément marquée par la solidarité historique avec les peuples en lutte.
Chaque œuvre exposée raconte une histoire particulière dans cette tragédie collective. Bougara Abdelouahab présente « Le cri de l’enfance », toile poignante où un enfant palestinien terrorisé fuit un avion qui menace son corps fragile, métaphore saisissante de l’innocence broyée par la machine de guerre. Derradji Omar explore quant à lui le thème du déracinement forcé à travers « Les déplacés » et « Ma solitude », témoignages picturaux de l’exil imposé. Plus troublante encore, l’œuvre de Sahraoui Karima, « Les cris silencieux », déploie un arsenal technique varié pour représenter un missile explosant au milieu de vestiges humains, dans un paysage de désolation sanglante qui interroge frontalement le spectateur sur les limites de l’acceptable.
Le ministre a également rappelé que « l’artiste algérien envoie aussi un message d’espoir et d’amour à travers ces œuvres, qui illustrent la lutte et la résistance du peuple palestinien, afin d’affirmer que la Palestine n’est pas seule et que sa résistance sera inéluctablement couronnée de victoire et de liberté ». Cette dimension prophétique de l’art transforme l’exposition en véritable manifeste esthétique, où la création devient acte de foi en l’avenir. Ballalou a d’ailleurs établi un parallèle historique éloquent, affirmant que ces œuvres constituent « un message à nos frères en Palestine pour qu’ils continuent à résister, tout comme l’Algérie avait résisté face à l’Alliance atlantique durant la Révolution de libération ».
Cette exposition révèle la capacité unique de l’art à transcender l’actualité immédiate pour toucher à l’universel. En choisissant de représenter « la souffrance des femmes et des enfants » et en dépeignant « des scènes de crime horribles », les artistes assument pleinement leur rôle de témoins de leur époque. Ils dénoncent les « crimes ignobles de l’entité sioniste qui bombarde délibérément les maisons, les camps, les hôpitaux, les écoles et les lieux de culte à Ghaza et adopte la politique de famine ». Cette dimension testimoniale confère à l’exposition une portée qui dépasse largement le cadre esthétique traditionnel pour s’inscrire dans une démarche de mémoire active et de résistance culturelle. Jusqu’au 15 août, ces cent toiles continuent de porter un message d’humanité qui résonne bien au-delà des murs de la galerie Baya. Mohand Seghir