Sahara occidental: L’ONU dénonce la répression marocaine
Les experts de l’ONU lancent un appel urgent pour mettre fin aux violations des droits humains au Sahara occidental.
Dans une démarche sans précédent, huit rapporteurs spéciaux des Nations unies ont lancé un appel urgent au Maroc pour qu’il mette fin immédiatement à sa campagne systématique de répression contre le peuple sahraoui dans les territoires occupés du Sahara occidental. Cette intervention officielle de l’ONU marque une escalade significative dans la pression internationale exercée sur Rabat concernant ses violations flagrantes des droits humains dans la dernière colonie d’Afrique. La communication conjointe des experts onusiens dresse un tableau accablant de la réalité vécue par les Sahraouis sous occupation marocaine. Ils dénoncent une « campagne de répression, de discrimination raciale et de violence » orchestrée par les autorités marocaines contre les défenseurs sahraouis des droits humains, les journalistes et tous ceux qui osent revendiquer leur droit légitime à l’autodétermination. Cette campagne systématique a fait 79 victimes identifiées, un chiffre qui ne reflète probablement qu’une partie de la réalité sur le terrain.
L’appel de l’ONU fait suite à une plainte déposée par trois organisations sahraouies de référence : le Groupe de travail sur les droits de l’homme au Sahara occidental occupé, l’Association sahraouie des victimes de graves violations des droits de l’homme commises par l’État marocain et le Collectif des défenseurs des droits humains sahraouis. Ces organisations, qui œuvrent courageusement malgré la répression, ont documenté minutieusement les violations subies par leur peuple. Tragiquement, depuis le dépôt de cette plainte, deux des victimes mentionnées, Fatimato Dahouar et Hijji Mbarek, sont décédées, témoignant de la gravité de la situation.
Les rapporteurs spéciaux révèlent un système de répression particulièrement sophistiqué et brutal. Les autorités d’occupation marocaines ont mis en place un dispositif de surveillance généralisée, d’intimidation systématique et de harcèlement continu visant spécifiquement les Sahraouis qui osent exprimer leur identité nationale ou revendiquer leurs droits légitimes. Les méthodes employées incluent des détentions arbitraires, des violences policières, des restrictions de mouvement, des perquisitions domiciliaires illégales et un isolement social orchestré. Cette répression vise particulièrement ceux qui participent à des manifestations pacifiques, assistent à des conférences internationales ou simplement expriment leur soutien à l’identité et à l’indépendance sahraouies.
La dimension raciale de cette oppression est particulièrement préoccupante. Les experts de l’ONU documentent un système de profilage racial systématique où les Sahraouis sont victimes d’expropriation de leurs terres ancestrales, de privation de logement adéquat et de brutalités policières ciblées. Parallèlement, ces mêmes terres sont redistribuées aux colons marocains qui bénéficient d’un soutien financier pour s’installer, illustrant parfaitement la politique de colonisation de peuplement menée par Rabat. Cette discrimination institutionnalisée rappelle les heures les plus sombres de l’apartheid et constitue une violation flagrante du droit international.
Les organisations de défense des droits humains sahraouies subissent une pression particulière, leurs bureaux étant régulièrement bloqués et leurs membres empêchés de se déplacer librement. Cette stratégie vise clairement à étouffer toute voix dissidente et à empêcher la documentation des violations des droits humains. Les journalistes et avocats qui tentent de défendre les droits du peuple sahraoui font également l’objet de surveillance, d’intimidation et d’agressions physiques, créant un climat de terreur destiné à dissuader toute forme de résistance pacifique.
Malgré les multiples réponses du Maroc aux communications précédentes de l’ONU, les experts constatent avec inquiétude que non seulement les pratiques répressives se sont poursuivies, mais qu’elles se sont même aggravées au cours des cinq dernières années. Cette escalade témoigne du mépris affiché par Rabat envers le droit international et les instances onusiennes.
Les rapporteurs spéciaux rappellent d’ailleurs que les Nations unies considèrent le Sahara occidental comme un territoire non autonome depuis 1963, inscrit sur la liste des territoires en attente de décolonisation. Il s’agit aujourd’hui du seul territoire non autonome restant dans la région africaine, une anomalie historique que le Maroc perpétue par la force et la répression. Cette qualification juridique internationale confère au peuple sahraoui un droit inaliénable à l’autodétermination, reconnu par l’ensemble de la communauté internationale.
L’intervention de l’ONU constitue un tournant majeur dans la reconnaissance internationale de la gravité de la situation au Sahara occidental. Elle expose au grand jour les méthodes coloniales employées par le Maroc. Les organisations sahraouies soulignent à juste titre que toutes ces violations ont une cause unique : l’entrave systématique par le Maroc à l’exercice par le peuple sahraoui de son droit fondamental à l’autodétermination.
Lyes Saïdi