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Henri Pouillot, militant anticolonialiste : « Macron instrumentalise la question mémorielle »

C’est un message clair qu’a adressé Henri Pouillot,  militant anticolonialiste et témoin de la Guerre de libération nationale, aux autorités françaises, à leur tête le Emmanuel Macron.

Ainsi à la veille de la commémoration des massacres du 17 octobre 1961, Henri Pouillot explique qu’« il est impératif et indispensable que la France reconnaisse et condamne ces crimes commis en son nom ». Le militant anticolonialiste a également mis en avant l’instrumentalisation des questions mémorielles par le président Français et les enjeux que revêtent de tels sujets dans les prochaines élections présidentielles Françaises qui auront lieu au printemps 2022.

Dans un entretien accordé à l’APS à la veille de la commémoration de ces massacres, ce témoin de la Guerre de libération nationale a lancé des piques en direction des officiels français, leur faisant rappeler que « ce n’est pas un simple pardon qui est nécessaire », le pardon, explique-t-il « c’est simplement la demande d’une excuse pour une petite faute, pas possible pour un crime ».C’est dans ce sens qu’Henri Pouillot lie la question du traité d’amitié entre la France et l’Algérie à cette demande de pardon dont  l’Etat Français est redevable devant l’histoire en affirmant dans cet entretien que « c’est à ce prix que ce traité d’amitié est nécessaire et indispensable compte tenu des liens nombreux et des familles éclatées des deux cotés de la méditerranée »,  et que « c’est à ce prix que  ce traité d’amitié entre l’Algérie et la France est possible ».  C’est aussi en ce sens que ce témoin de la guerre de libération nationale et militant anticolonialiste a relevé que « l’histoire du colonialisme enracinée en Algérie, puis de la guerre de libération nationale ont créé des antagonismes importants ». Il réitère à cet effet « la nécessité de voir la France reconnaitre les crimes commis en son nom et les condamner ». A travers cette déclaration, Henri Pouillot semble adresser un autre message à l’actuel chef de l’Etat Français qui s’interroge sur l’attitude des Algériens à rejeter le fait colonial soixante années après l’indépendance du pays.

Un fait colonial résumé par Henri Pouillot par les pratiques inhumaines à l’œuvre durant un siècle et demi d’occupation expliquant que « le colonialisme, les tortures, les viols, les camps d’internements, pudiquement appelés regroupements ou encore les Crevettes Bigeard, sont des crimes contre l’humanité, ceux du 17 octobre 1961 et du 8 février 1962 sont des crimes d’Etat, alors que l’utilisation du gaz Vx et Sarin, les villages rasés au napalm, les essais nucléaires, les exécutions sommaires et les corvées de bois sont des crimes de guerre ».Evoquant les massacres des civils algériens lors de la manifestation pacifique du 17 octobre 1961, ce militant anticolonialiste affirme que l’ampleur des massacres  dont le pays commémore la date aujourd’hui « a été un des éléments déterminants ayant accélérer les pourparlers entre le Gouvernement provisoire de l’Algérie (GPRA) et le gouvernement Français », rappelant toutefois que ces massacres ont été occultés durant plusieurs années.

Il accusera par la suite Emmanuel Macron de tentatives d’instrumentalisation de la mémoire de la guerre de libération nationale.En effet, Henri Pouillot estime que « depuis quelques mois déjà Macron  cherchait à instrumentaliser les mémoires de la guerre de libération nationale », indiquant que « certes il (Emmanuel Macron) a reconnu la torture et l’assassinat de Maurice Audin, puis celui d’Ali Boumendjel, mais pourquoi a-t-il oublié Larbi Ben M’Hidi », regrettant le fait que le président Français « ait demandé pardon aux Harkis et déposé une gerbe de fleurs au Mémorial du Quai Branly à Paris le 26 mars 2021 pour honorer l’OAS ».Poursuivant son réquisitoire  contre le président français, Henri Pouillot rappelle que Macron « s’est permis des propos inacceptables envers l’Algérie et son peuple, il a même osé dire que nos générations n’ont pas vécu cette guerre et ça nous libère de beaucoup de choses ».

Ce militant anticolonialiste affirme que  par rapport aux propos tenus par  l’actuel chef d’Etat français, il « est évident que l’instrumentalisation des mémoires de la guerre de libération nationale n’est pas fortuite ». « L’objectif essentiel (de Macron) en est la préparation de sa campagne électorale pour le printemps 2022 », précisera Pouillot.

Il expliquera à la fin que  le rapport commandé  à  l’historien Benjamin Stora sur les questions mémorielles  « en était les prémices et qu’il ne cherche peut être  pas à rallier l’extrême droite mais il donne de nombreux gages à une partie de cette droite nostalgique du colonialisme et de l’Algérie Française en ménageant le courant extrémiste de l’OAS ». « Pour Macron, il semble donc que cette orientation est nécessaire pour sa réélection même si les relations avec l’Algérie doivent se dégrader », assenera Henri Pouillot.

Boubekeur Amrani

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