Carnet d’été sur une région pas comme les autres : Collo l’enchanteresse
Tamanart est une bourgade où le rivage et le massif se rejoignent d’une manière magique et envoûtante. Cette rencontre est ponctuée par le ruissellement des eaux émanant du « Djebel Kanoua » avec un rythme dégageant sans cesse une symphonie naturelle où tous les éléments de la nature s’allient pour composer un morceau d’idylle exprimant une sorte d’hymne d’amour pour cette Dame nature qui s’est érigée en une nymphe.
La saison estivale de cette année a permis aux Algériens des autres régions du pays de découvrir un joyau que renferme l’Algérie. Ce joyau s’appelle Collo ou « Chullu », un nom qui remonte à l’antiquité bien avant la présence romaine. Chullu est une cité conçue par les phéniciens de par les caractéristiques qu’elles reflètent en termes de négoce maritime, de richesse halieutique et agricole à cette époque.
Collo, pour revenir au nom le plus répandu, faisait partie des premiers comptoirs et ports. C’est cette caractéristique qui a donné à la région un caractère maritime par excellence. Le port de pêche en est le témoin saillant de cette vocation maritime mais aussi agricole de cette muse qui enchante encore les amoureux et les adeptes de cette ville aux mille et une charades et légendes.
Cette année , les colliottes ont été submergés par l’affluence sans précédent des visiteurs de tous les coins du pays. C’est la première fois que Collo se transforme en un rituel estival et un pèlerinage aussi massif et historique.
Collo retrouve son aura d’antan, elle se met au diapason pour apporter son charme envoûtant et ses goûts ensorcelants aux visiteurs qui ont mis les pieds pour la première fois dans cette région.
El-Djerda, expression de la beauté de Dame Nature
Dès que la brise marine commence à se faire sentir, c’est-à-dire à partir de Tamalous, on se rend compte que Collo n’est plus un parcours routier de 500 Km à partir d’Alger qui se construisait via des anciennes images et des souvenirs suaves.
La vue de la presqu’île à partir de Kerkera et son lieu féerique de Benzouit procure au visiteur de cette région côtière une sensation étrange, celle d’être hapé et convoité par l’écosystème et les reliefs de cette ville au point où notre esprit se laisse entraîner dans une ambiance semblable à une espèce d’extase jamais vécue, pour ainsi dire, la personne se voit transportée hors de soi.
C’est la fresque naturelle de la presqu’ile d’El-Djerda qui offre cette sensation d’attachement à une région même s’il s’agissait d’une première rencontre avec les lieux et les espaces de cette ville.
El-Djerda est une montagne partagée entre une partie de la mer et le sol colliotte. Elle présente un paysage panoramique à plusieurs dimensions. El-Djerda surplombe la ville de Collo à telle enseigne que l’ensemble des bourgades et villages sont résumés à travers un petit regard émanant de ce « perchoir » naturel d’El-Jarda qui synthétise la ville de Collo et ses régions en une image panoramique d’ensemble à couper le souffle.
Collo ou El Qoll comme l’appellent les colliottes est située entre El-Djarda et Djebel Dembou. Cette montagne située au cœur de la mer en longeant le sol et les massifs dont le mariage dégage un décor indescriptible.
Djebel Dembou donne un accès panoramique d’en haut. Il domine en diagonale El-Djerda et fait un lien symétrique avec le mont où est situé le mausolée du Saint patron Sidi Achour qui enveloppe Benisaid et le Cap Bougaroun.
C’est dire que la ville de Collo est l’une des rares régions côtières qui dispose d’une aptitude et une caractéristique touristique de choix.
Tamanart, l’ivresse naturelle !
Les colliottes prenaient l’ancien chemin montagneux du Cheraïa pour accéder à la plage sublime du Tamanart. Ce chemin abrupt et dangereux a été contourné par la mise en exploitation d’une nouvelle route facile, rapide et panoramique à partir de Aïn-Doula en empruntant le massif du Djebel Dembou.
Tamanart est une bourgade où le rivage et le massif se rejoignent d’une manière magique et envoûtante. Cette rencontre est ponctuée par le ruissellement des eaux émanant du « Djebel Kanoua » avec un rythme dégageant sans cesse une symphonie naturelle où tous les éléments de la nature s’allient pour composer un morceau d’idylle exprimant une sorte d’hymne d’amour pour cette Dame nature qui s’est érigée en une nymphe.
C’est cela Tamanart, un endroit de villégiature pour la majorité des Algérois qui sont venus en sillonnant des centaines de kilomètres pour savourer cette magie naturelle dont Tamanart est l’incarnation par excellence.
Tout est vierge et sauvage dans cette région. Tamanart est à la fois le massif qui subjugue et qui convoite, et le rivage limpide et ses sables fins cristallins. C’est un lieu où l’interlude d’été est foncièrement reposant pour rompre avec l’année active et ses multiples dépits. Tamanart est le coin thérapeutique où les personnes pourraient se permettre une « fugue » dans une nature riche en variété et d’espèces indiquant que l’écosystème est toujours intact pour profiter d’un repos gratuit et d’une période de « convalescence » naturelle à la portée de tout le monde.
Tamanart est la quintessence d’une beauté naturelle taillée et sculptée d’une main de la nature avec harmonie et synergie.
Le camping sauvage a retrouvé sa place d’antan dans le beau rivage du Tamanart après une période sombre des années rouges de la dernière décennie du siècle écoulé. Ce signe renseigne sur le retour des Algériennes et des Algériens à leur « berceau » naturel en choisissant les beaux endroits et les lieux fétiches dont la nostalgie garde sa flamme et sa vivacité.
Collo c’est aussi les gens simples et sobres. Des gens fiers de leur identité colliotte dépouillée de toutes les formes de xénophobie et d’exclusion. A Tamanart on y retrouve toutes les régions du pays. C’est la mosaïque traduisant l’esprit ouvert des colliottes et leur sens cosmopolite qui reflète le caractère méditerranéen et son humanisme ancré à travers les siècles et l’histoire.
Le tourisme, cette fausse note !
L’aspect vierge et sauvage du Collo subjugue réellement les visiteurs et les amoureux du tourisme intérieur. Mais ce potentiel naturel est orphelin pour ne pas dire qu’il est délaissé et réduit à son expression de base, à savoir une région sans projet et stratégie touristique digne de ce nom.
Collo est dépourvue d’un plan à même de réhabiliter le tourisme de masse. C’est ce talent d’Achille qui affecte la région en lui tournant le dos d’une manière horrible et décevante.
Les structures d’accueil sont dérisoires hormis l’Hôtel Bougaroun qui a été construit par l’Etat durant les années 70.
Collo séduit certes, mais cette séduction ne peut se maintenir en l’état si les efforts dans la perspective de sa mise en valeur sur le plan touristique ne sont pas fournis dans les proches années à venir.
Le tourisme est le parent pauvre dans la région de Collo. C’est une triste réalité qui
accompagne cette belle ville côtière où la vocation touristique s’impose avec acuité. L’état des routes est catastrophique, le schéma directeur est quasiment inexistant, le plan urbain avec ses stratifications nécessaires est relégué au dernier plan. C’est dire que les pouvoirs publics ne font que dans la démagogie et du populisme en matière de gestion de la cité en général et du tourisme en particulier.
Une saison estivale ce n’est pas des slogans et des campagnes fondées sur de la supercherie et des impostures pour la consommation locale. Collo a besoin de gestes concrets et des mesures urgentes pour qu’elle puisse se hisser au rang des régions et des villes qui devraient jalouser les autres villes du monde sans coup férir par ce qu’elle possède comme atouts touristiques de grandes qualités.
La beauté de Collo a besoin d’un entretien pour qu’elle puisse se maintenir et faire connaître les merveilles du pays. Le tourisme est une culture et celle-ci doit être instituée mordicus par les pouvoirs publics comme une exigence économique dans le cadre d’un investissement durable.
Certes, Collo a connu une affluence record cette année, mais cette affluence ne peut durer si les investissements dans cette région pittoresque et féerique ne se déploient pas et que l’Etat n’essaye pas de mettre de l’ordre et reprend en main la politique touristique tel qu’il se doit.
La beauté sauvage d’une région a besoin d’un accompagnement réel, c’est-à-dire un plan et une stratégie globale pour en faire un potentiel d’investissement qui capte et convoiterait la masse des touristes qui à l’intérieur, qui à l’extérieur du pays.
Ce dont Collo a besoin, c’est bien un plan d’urgence pour la sauver de la marginalisation à tous les niveaux dont elle est victime.
Tout compte fait, Collo restera une muse qui inspire les visiteurs et ses adeptes malgré l’ingratitude des pouvoirs publics à son égard.
Rachid Nassouti