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Les membres de la Haute Autorité de transparence et de lutte contre la corruption prêtent serment aujourd’hui : Les préalables de la moralisation de la vie publique

C’est la dernière ligne droite. La présidente et les membres de la Haute Autorité de transparence et de lutte contre la corruption doivent prêter serment aujourd’hui pour enfin entamer leurs missions. Ils devront faire face à de grandes attentes et répondre aux objectifs assignés en matière de lutte contre la corruption et de moralisation de la vie publique. 

La Haute Autorité de transparence et de lutte contre la corruption va, enfin, devenir opérationnelle. Prévue par la Constitution de novembre 2020, la création de cette instance indépendante dont la mission principale est d’assurer la veille permanente dans le cadre de la lutte contre la corruption et constituer une interface crédible pour les lanceurs d’alerte, a suivi un processus de près de deux années. Un processus qui a imposé la promulgation d’un texte de loi dédié, la nomination des douze membres avant leur installation officielle par le Premier ministre au mois de juillet dernier. La prestation de serment, prévue aujourd’hui, acte le début des activités de cet organe doté de larges prérogatives afin de contribuer à la lutte contre la corruption et à l’implémentation de la culture de la transparence. Une prestation de serment qui intervient trois jours après l’examen du texte relatif à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme en Conseil des ministres et lors duquel le président de la République a souligné « l’importance de la lutte contre le phénomène de blanchiment d’argent, de financement du terrorisme et la corruption », insistant sur « l’application et le respect de toutes les procédures et les jugements dans la confiscation ». Le cadre réglementaire et les réformes devant consolider l’arsenal permettant de lutter plus efficacement contre la corruption se met en place graduellement, en attendant la révision annoncée de la loi de 2006 relative à la prévention et à la lutte contre la corruption. Un texte impératif pour compléter le dispositif et offrir au nouvel organe les outils et les marges de manœuvre nécessaires pour accomplir ses missions. 

Il n’en demeure pas moins que les attentes en ce qui concerne le rôle que devra jouer cette Haute Autorité sont grandes. Une instance indépendante, présidée par Salima Mousserati, Professeure en droit et qui a siégé au défunt Conseil constitutionnel après sa nomination 2018 et qui compte 12 membres. Des membres qui comptent parmi eux ceux nommés par le président de la République, les personnalités choisies en raison de leurs compétences par les présidents deux chambres du Parlement et le Premier ministre ou le chef du Gouvernement, ceux devant représenter la Cour suprême, le Conseil d’Etat et la Cour des comptes, et enfin les personnalités de la société civile. 

Éloigner les interférences politiques

Elle est dans ce sens destinée à supplanter les organes créés dans le cadre de la loi de 2006, à l’image de l’Office central de répression de la corruption placé sous l’autorité du ministère de la Justice et l’Organe national de prévention et de lutte contre la corruption qui avait été lui-aussi présenté comme une instance indépendante et qui a été doté de larges prérogatives, mais qui a été néanmoins placée sous l’autorité du président de la République. Des organes qui ont démontré leurs défaillances sous la gouvernance du régime Bouteflika et failli à lutter efficacement contre la corruption et la prédation des deniers publics qui avaient particulièrement pris de l’ampleur ces dernières années.  C’est dire que les défis que la nouvelle Haute Autorité de transparence et de lutte contre la corruption sont importants au regard du passif en la matière. Et c’est dans ce sens qu’une nouvelle approche a été proposée, en impliquant notamment des personnalités indépendantes et des représentants de la société civile afin de consolider les canaux de dialogue avec la société civile et de s’ouvrir sur les lanceurs d’alerte. Une approche également assise sur un élargissement des prérogatives de l’instance en matière d’enquêtes administratives et financières et de saisine des instances de justice, notamment du Pôle pénal économique et financier du Tribunal de Sidi M’hamed.  Elle peut ainsi mener des investigations concernant toute personne susceptible d’être impliquée dans la dissimulation de richesse injustifiée d’un agent public. La nouvelle autorité peut également demander des explications écrites ou orales à l’agent public ou à la personne concernée. Elle dispose aussi de la prérogative de saisir le pôle pénal économique et financier du Tribunal de Sidi M’hamed pour prendre des mesures conservatoires pour geler les opérations bancaires ou saisir des biens. Le cadre est mis en place. Sur le papier, la Haute Autorité de transparence et de lutte contre la corruption dispose de tous les outils pour contribuer de manière efficace à implémenter la culture de la transparence au sein des institutions de l’État à tous les niveaux, consolider la veille, surveiller les phénomènes liés à la corruption et débusquer les actes délictuels. L’atteinte de ces objectifs reste, cependant,  tributaire d’un facteur essentiel : rompre avec certaines pratiques et éloigner les interférences politiques qui avaient fini par paralyser les organes qui avaient été créés pour répondre aux même objectifs par le passé.

 Chokri Hafed

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