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La fortune cachée de Mohamed VI

« Roi absent et prédateur », « politique de la terre accaparée », « Au Maroc, l’économie… c’est le roi ». Voilà quelques-unes des caractéristiques que l’enquête publiée par le magazine français Marianne sur la fortune cachée du roi du Maroc et de son origine assise surtout sur la prédation.

Voilà des révélations qui mettent en émoi les Marocains plongés dans une crise économique et sociale sans précédent et qui a alimenté une colère populaire que le régime marocain a décidé d’ignorer. Le fait est que le régime est assis sur la prédation et qu’il n’a pas l’intention de changer. Si l’implication du chef du gouvernement marocain dans des conflits d’intérêt et les pontes du régime dans des affaires de corruption a défrayé la chronique à plusieurs reprises, la récente enquête du magazine Marianne sur la fortune cachée du roi démontre l’étendue de la prédation institutionnalisée au Maroc. Bien que tronquée, car les journalistes qui ont enquêté sur la fortune du roi ont été expulsés par les autorités marocaines, l’enquête fait des révélations percutantes. De l’accaparement des terres des tribus par le palais royal, aux conflits d’intérêts en passant par ce que coûte le roi, son palais, sa cour et le train de vie extravagant de tous ce beau monde au contribuable marocain, la fortune de ce monarque « absent », comme le décrit le magazine risque de faire jaser dans les chaumières. En faisant le résumé des calculs, Marianne souligne que Mohamed VI coûte « 657 000 euros par jour au contribuable marocain ». Un chiffre qui donne le tournis, qui choque même lorsqu’on pense aux conditions socio-économiques déplorables dans laquelle vit la majorité de la population.

Le Magazine français, réputé être de gauche, rappelle que la fortune du monarque a été estimée à 6 milliards d’euros par « Forbes » en 2015, soulignat que cette richesse « s’abreuve à d’innombrables sources ». « Elle serait bien plus importante que le chiffre avancé par le magazine américain », note le magazine qui cite l’économiste Fouad Abdelmoumni. Dans le bulletin officiel – missive royale annuelle, précise que « Forbes n’est allé voir que la capitalisation des très nombreuses entreprises du holding royal Al Mada pour calculer sa fortune, mais ce calcul ne prend pas en compte la partie invisible ».  L’enquête publiée en plusieurs épisodes souligne ainsi ce que coûte la maison royale au budget de l’État. Ainsi, explique Marianne,au chapitre des « dépenses de fonctionnement du budget général pour l’année 2023 », il apparaît que la rémunération du roi, appelée « listes civiles » équivaut à 2,36 millions d’euros annuels. Outre son salaire, la « dotation de souveraineté » rémunère les « missions de la monarchie » à hauteur de 47 millions d’euros annuels, ajoute l’enquête.

Les frais de la cour royale comprenant ses domestiques coûtent 52 millions d’euros à l’année tandis que 138 millions d’euros annuels sont alloués au « matériel et dépenses diverses ». Marianne précise que « le budget officiel alloué à Mohammed VI et à sa famille est plus élevé que celui qui est alloué aux ministères du Transport, de la Transition énergétique et du Développement durable, du Tourisme, de l’Eau, du Commerce et de l’Industrie réunis… Il est également 23 fois plus élevé que celui du chef du gouvernement, dont on dit qu’il peine parfois à financer tous ses déplacements ».

Au-delà de ces dotations budgétaires, l’enquête met en lumière le train de vie extravagant du monarque de sa cour. Bien que Mohammed VI ne possède officiellement que 17 palais au Maroc, l’économiste marocain Fouad Abdelmoumni affirme qu’en réalité, il a au moins une résidence dans chaque petite ville du pays. Ces résidences nécessitent une main-d’œuvre importante rémunérée en permanence, parfois en détournant des fonds provenant du budget de différents ministères. La dérive va plus loin, vue que la famille royale dispose d’une véritable arme de prédation. Marianne révèle ainsi que le roi Mohammed VI exerce un contrôle considérable sur l’économie marocaine grâce à la holding El Mada, qui regroupe toutes ses sociétés. Ces entreprises sont présentes dans de nombreux secteurs, y compris l’énergie, la finance, la construction, les mines, l’éducation privée et la grande distribution. Cette mainmise sur l’économie soulève des questions de conflit d’intérêts, car certaines de ces sociétés opèrent également dans des secteurs régulés par l’État, ce qui signifie que le roi a un contrôle indirect sur ces secteurs. L’enquête de Marianne examine également l’accaparement des terres par le roi et son entourage, souvent au détriment de pauvres paysans. Mohammed VI est décrit comme un « prédateur redoutable ». Les journalistes de Marianne se sont attardés sur la résistance que tentent d’opposer une trentaine de familles du douar Ouled Sbita, près de Rabat, à la construction d’une zone résidentielle et d’un terrain de golf sur un terrain de 450 hectares leur appartenant. Le projet est mené par un ancien proche du roi, Anas Sefrioui, fondateur de la société Addoha. Une richesse qui contraste avec la misère dans laquelle vit la population. Marianne cite ainsi l’économiste Fouad Abdelmoumni, lequel souligne que 90% des 27,5 millions de Marocains en âge de travailler ne touchent pas le salaire minimum légal, en grande partie en raison du chômage, du travail à temps partiel ou de l’emploi informel.

Hocine Fadheli

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