SILA 2024 : Relever les défis de l’industrie du livre en Algérie
Les participants à une conférence organisée par le Syndicat national des éditeurs de livres en marge de la 27e édition du Salon international du livre d’Alger (SILA), qui se tient jusqu’au 16 novembre en cours à Alger, à mieux encadrer l’industrie du livre.
Cette rencontre, qui s’inscrit dans le cadre des célébrations du 70e anniversaire du déclenchement de la Guerre de libération nationale, a rassemblé des universitaires, des éditeurs et des professionnels du secteur pour dresser un état des lieux de l’industrie du livre en Algérie. Le docteur en économie et député à l’Assemblée populaire nationale, Abdelkader Berriche, a ainsi souligné l’importance de « définir un cadre moral et juridique » qui puisse garantir la « sécurité intellectuelle » en Algérie, de même pour la production des livres qui doit évoluer dans un cadre légal et sain. Selon lui, le livre est un « réceptacle d’idées qui agissent sur la société » et devrait donc être considéré comme un « produit économique et commercial » soumis aux règles du marché.
Le président de la Commission de l’édition et de diffusion au Centre national du livre, Yasser Abou Yahia Meziane, a quant à lui, déploré la réduction alarmante du nombre de librairies, soumises, non seulement à la loi de l’offre et la demande, mais aussi à l’omniprésence sur la toile des librairies électroniques. Le conférencier a ensuite rappelé les efforts de l’Etat à résoudre les problèmes de l’industrie du livre, œuvrant notamment à améliorer sa situation économique après l’impact de la pandémie du corona virus. M. Yasser Abou Yahia Meziane a annoncé une nouveauté qui consiste en la création du statut d’ »agent littéraire » dont la fonction de médiateur est d’assurer le suivi des ouvrages, avant et après la publication avec tous les partenaires de l’auteur -dont la négociation n’est pas le métier- qui constituent sa chaine de production. Enfin, le statut de l’auto-entreprenariat a également été évoqué par M. Meziane, une autre alternative qui permet à l’auteur de s’autoproduire. L’enseignant chercheur et expert en économie à l’université de Médéa, Omar Haroun, a quant à lui évoqué le problème de l’imprimerie traditionnelle qui n’arrive plus, selon lui, à rivaliser avec les livres en version électronique, une situation qui met « l’existence du livre en péril ». Il a également souligné les bénéfices potentiels de l’adaptation cinématographique des œuvres littéraires, un exemple d' »économie culturelle réussi » qui assure, a-t-il martelé, des entrées d’argent conséquentes pour le pays dans une relation « gagnant-gagnant » avec l’auteur et son producteur.
Enfin, l’écrivain-journaliste Boualem Ramdani a insisté sur le fait qu' »écrire était avant tout un acte libre », que les pouvoirs publics doivent accompagner. Il a également rappelé que la loi du marché du livre était « soumise aux règles de la globalisation », nécessitant une mise à niveau pour être au diapason avec les pays où le livre représente « un vrai projet économique ». Au-delà de ces différents constats, les participants ont également soulevé d’autres problématiques, telles que le coût élevé de l’importation du papier ou la nécessité de définir le rapport entre l’industrie du livre et l’entreprenariat. Cette conférence a permis de dresser un panorama complet des enjeux auxquels est confronté le secteur du livre en Algérie. Les discussions ont mis en lumière l’importance de définir une stratégie globale, associant les pouvoirs publics, les professionnels et les créateurs, pour relever ces défis et permettre à l’industrie du livre de se développer dans un cadre favorable. Au-delà de la simple analyse, les intervenants ont également évoqué des pistes concrètes, telles que le renforcement du cadre juridique, le soutien à l’innovation numérique ou encore la valorisation des talents locaux. Ces propositions témoignent de la volonté des acteurs de l’industrie du livre algérienne de s’engager dans une dynamique de transformation durable. Alors que le livre traverse une période de mutation profonde, la conférence a permis de mettre en lumière les enjeux spécifiques auxquels est confronté le secteur en Algérie. Elle a aussi démontré la capacité des professionnels à se mobiliser pour imaginer des solutions innovantes, dans le but de faire du livre un véritable levier de développement économique et culturel pour le pays.
Mohamed Seghir