Violences meurtrières et besoins humanitaires croissants : La crise en RDC s’aggrave
La République démocratique du Congo (RDC) continue de faire face à une crise humanitaire et sécuritaire d’une ampleur considérable, marquée par des violences persistantes dans plusieurs régions du pays. Selon les dernières informations en provenance du nord-est du pays, « au moins 23 personnes ont été tuées et une vingtaine enlevées par les éléments du groupe armé ADF (Allied democratic forces) », comme l’ont indiqué des sources locales et humanitaires ce vendredi 1er mars 2025. Ces attaques se sont déroulées « mardi et mercredi dans plusieurs localités du territoire de Mambasa, situé dans la province de l’Ituri qui jouxte la frontière ougandaise », précisent ces mêmes sources. Jospin Paluku, coordinateur d’une des principales organisations de la société civile dans le territoire de Mambasa, a déclaré qu' »un total de 23 personnes » avaient été « exécutées par ces rebelles » dans les villages de Matolo et de Samboko, tout en précisant qu’il s’agissait d’un « bilan provisoire ». Il a également signalé qu' »au moins 20 civils ont également été pris en otages, dont le fils du chef de village de Matolo ». Ces informations ont été confirmées par plusieurs sources humanitaires qui craignent un alourdissement du bilan. Le colonel Matadi Muyapandi, administrateur policier de Mambasa, a précisé que « les victimes sont essentiellement des agriculteurs qui étaient dans leurs champs ». Cette série d’attaques marque « la première attaque signée par les ADF depuis le début de l’année 2025 » dans cette zone « après une accalmie de trois mois », selon Jospin Paluku. La situation est particulièrement dramatique à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, où le gouvernement congolais a annoncé jeudi soir un bilan humain extrêmement lourd. Selon le ministre congolais de la Santé, Roger Kamba, « plus de 8.500 corps ont été enterrés et une trentaine de corps sont encore dans les morgues à Goma », conséquence des hostilités menées par la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23) dans ce centre urbain régional qui abritait environ un million d’habitants et plus de 700.000 déplacés avant le conflit. Le ministre a également fait état de « 5.597 blessés » enregistrés dans les structures sanitaires de la ville. La situation humanitaire y est d’autant plus préoccupante que, selon l’ONU, « les opérations humanitaires à Goma, plaque tournante logistique pour toute la région, sont gravement affectées, son aéroport international restant toujours fermé ». Un couloir humanitaire a néanmoins été ouvert à la mi-février dans la région, « permettant l’Organisation mondiale de la santé (OMS) d’acheminer des produits humanitaires via le Kenya et le Rwanda ». La rébellion du M23 a considérablement étendu son emprise territoriale, ayant « capturé de nombreuses villes et localités dans l’est de la RDC, dont Goma et Bukavu (chef-lieu de la province du Sud-Kivu) ». Dans cette dernière ville, de nouvelles violences ont été signalées jeudi, avec « au moins onze personnes tuées et 65 autres blessées par plusieurs explosions au cœur de Bukavu, peu après un meeting politique ». Face à cette escalade, le secrétaire général adjoint de l’ONU aux opérations de maintien de la paix, Jean-Pierre Lacroix, « avait mis en garde contre le risque d’un débordement régional du conflit en RDC ». Pour faire face à cette crise multidimensionnelle, « les Nations Unies et les autorités congolaises ont lancé, jeudi à Kinshasa, le Plan de réponse humanitaire 2025, d’un montant de 2,54 milliards de dollars pour venir en aide à 11 millions de personnes ». Selon l’ONU, « parmi les 11 millions de personnes à assister figurent 7,8 millions de déplacés internes, l’un des niveaux les plus élevés au monde ». L’organisation internationale estime que « plus de 21 millions de Congolais sont affectés par des crises multiples, notamment des conflits armés, des catastrophes naturelles et différentes épidémies ». Bruno Lemarquis, Coordonnateur humanitaire de l’ONU en RDC, a souligné la gravité de la situation en déclarant que « tous les signaux d’alerte sont au rouge. Mais même face à ces défis énormes, l’action humanitaire démontre chaque jour son efficacité pour sauver des vies ». Il a également réaffirmé l’engagement des organisations humanitaires en précisant que « notre seule mission est de porter assistance aux populations les plus vulnérables, où qu’elles se trouvent ». Le plan humanitaire présenté est ambitieux et couvre de multiples domaines d’intervention. Il « prévoit de prendre en charge 1,5 million d’enfants souffrant de malnutrition aiguë, de garantir l’accès à l’eau potable pour cinq millions de personnes, et de lutter contre des épidémies telles que le choléra, la rougeole et le mpox ». Au-delà de ces mesures d’urgence, « il soutiendra le retour des déplacés, la relance des moyens de subsistance, et la préparation aux chocs climatiques », témoignant d’une volonté d’inscrire l’action humanitaire dans une perspective plus durable, malgré l’instabilité persistante qui caractérise plusieurs régions du pays.
R.I.