Baisse des investissements dans le secteur pétrolier : Vers un baril à 125 dollars ?
La baisse des investissements mondiaux dans le secteur des hydrocarbures réduit la capacité des producteurs à répondre à la demande et alimente la hausse actuelle des cours qui ont franchi un nouveau cap hier en s’approchant de la barre des 91 dollars pour le Brent. Dans ce contexte, l’expert en énergie, Mahmah Bouziane avertit contre les conséquences de la baisse des investissements qui conduirait à une hausse continue des cours, lesquels pourraient atteindre 125 voire 150 dollars.
Dans un entretien qu’il a accordé à l’agence Algérie Presse service, l’expert décortiqué le secteur de l’énergie et les raisons principales qui ont été à l’origine de la récente hausse des prix du pétrole. Il a affirmé que «cette augmentation est liée à la forte baisse des investissements pétroliers et des réserves commerciales dans les pays consommateurs». Il a ajouté que «plusieurs facteurs ont concouru à la hausse des prix du pétrole, tarifié actuellement au prix de 90 USD». Il s’agit, selon la même source, de «la baisse des investissements dans la chaîne de l’industrie pétrolière et des capacités de réserves de production dans la plupart des pays producteurs de pétrole. Et d’ajouter que «les réserves commerciales de pétrole ont diminué dans les pays consommateurs». «Elles ont atteint, dans les pays de l’OCDE, des niveaux jamais enregistrés depuis l’an 2000», a fait savoir l’expert qui citera également «d’autres facteurs conjoncturels dont essentiellement la hausse des prix du gaz qui a poussé les consommateurs à se tourner vers le pétrole comme ressource alternative, en plus de la situation géopolitique à la frontière entre la Russie et l’Ukraine, le dossier nucléaire iranien et l’état des approvisionnements dans certains pays producteurs comme la Libye, l’Azerbaïdjan, le Kazakhstan et le Nigeria». La même source a fait savoir que «ces facteurs font planer l’incertitude sur les prix du pétrole à l’avenir». Car, a-t-il expliqué, « il est difficile de prévoir l’évolution des relations russo-ukrainiennes et comment elles pourraient affecter les approvisionnements en gaz via Nord Stream, de même qu’il est impossible de savoir si un accord définitif sera trouvé sur le dossier nucléaire iranien qui permettrait le retour de la part de l’Iran dans la production mondiale de pétrole». La tendance vire vers le mix énergétique de l’Europe et de la possibilité de relever le taux de l’énergie nucléaire et du charbon, et ce aux fins d’assurer la sécurité énergétique, malgré les objectifs de la neutralité climatique annoncés. L’expert est dubitatif. Il prévoit que «tous ces facteurs réunis et qui augmentent l’état d’incertitude sur le marché, entraînent une mobilité des cours qui croissent et décroissent». Il rappellera la situation relevée durant les mois de novembre et de décembre passés. Durant cette période, les cours ont atteint les niveaux de 85 USD, avant de baisser, quelques semaines après, pour atteindre les seuils de 70 USD. «Il est fort probable que les prix du pétrole connaissent, durant l’année 2022, des bonds et des reculs», mais dans la fourchette allant entre 80 et 90 USD. Pour Bouziane «le rôle de l’alliance « Opec+» est à même d’entraîner les cours vers cette «zone de sécurité, en s’adaptant à l’évolution du marché de façon urgente». Il estime que «l’accord Opec+ représente « le véritable garant de la stabilité des cours sur le marché». L’Organisation des pays exportateurs du pétrole et ses alliés hors organisation ne visent pas un prix précis. Ils ambitionnent l’équilibre durable entre l’offre et la demande, de façon à garantir les approvisionnements à long terme étant donné que l’intérêt des producteurs et des consommateurs est commun. L’expert explique que «le marché pétrolier mondial a besoin d’une organisation comme l’Opec », estimant que cette organisation «ne cherche pas à réaliser des profits énormes au détriment de l’économie mondiale et ne met pas en péril l’équilibre du marché en cas de situation de force majeure (pandémie, conflits…). Se rapportant à certains rapports, il met en garde contre «une éventuelle hausse des prix à des niveaux records pouvant atteindre 125 USD, voire même 150 USD». Et d’ajouter que «de telles analyses alimentent la spéculation pour l’achat et le stockage de grandes quantités de pétrole en attendant que les prix remontent pour les revendre ». «Cette situation est très préjudiciable aux économies des pays producteurs de pétrole comme l’Algérie», a-t-il averti. La hausse des cours du pétrole au-dessus des «niveaux de sécurité entre 80 et 90 dollars sera préjudiciable aux budgets des pays producteurs de pétrole, en l’occurrence l’Algérie», a-t-il fait savoir. Car, a-t-il expliqué, elle «se répercutera sur les prix des biens de consommation importés en plus des coûts de transport». «La stabilité des prix du pétrole dans la zone de sécurité est «vitale». Car, elle concourt à la clarification de la vision des pays producteurs pour planifier leurs budgets annuels et lancer de nouveaux investissements dans les domaines de l’énergie, y compris les énergies renouvelables et vertes», a explicité Mahmah Bouziane.
Salim Abdenour