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Lutte contre la corruption : Traquer les signes d’enrichissement des agents publics

L’arsenal dédié à la lutte contre la corruption sera très prochainement renforcé par la révision de la loi relative à la prévention et la lutte contre la corruption et l’institution d’un nouveau dispositif consacré à la traque des signes d’enrichissement illicite des agents publics. 

Le ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Abderrachid Tabi, a annoncé hier le projet de création d’un organe d’enquêtes qui sera chargé de traquer les signes d’enrichissement illicite des agents publics dans le cadre de la révision prochaine de la loi 06-01 relative à la prévention et à la lutte contre la corruption. S’exprimant lors de la présentation du projet de loi fixant l’organisation, la composition et les prérogatives de la Haute Autorité de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption, le ministre de la Justice a indiqué que l’arsenal juridique destiné à lutter contre la corruption sera renforcé. Ainsi et en sus de la création de la nouvelle Haute Autorité de transparence et de lutte contre la corruption, il a annoncé l’amendement  prochain de la loi de 2006 dédiée à la lutte contre ce phénomène qui a pris une ampleur inédite dans notre pays. Un amendement qui permettra de renforcer les dispositifs de lutte contre la corruption, et notamment de traquer les signes d’enrichissement illicite, mais aussi de consolider les mécanismes relatifs à la récupération des fonds détournés.

La principale nouveauté doit permettre de renforcer les mécanismes de traque de l’enrichissement illicite des agents publics. Il a ainsi expliqué qu’il s’agit d’aller au-delà du dispositif relatif à la déclaration du patrimoine des agents publics et de consolider les mécanismes d’enquête administrative et financière afin de détecter l’enrichissement illicite des agents publics. Il a ainsi annoncé l’institution, à la faveur de cet amendement,  « d’une instance d’enquête » sur les signes d’enrichissement illicite chez les agents publics et ce, dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations du Conseil des ministres du 2 janvier dernier, portant création d’une instance d’enquête sur les signes d’enrichissement illicite des  agents publics.

Les nouvelles dispositions introduites proposent la création d’un « mécanisme opérationnel et d’application » pour vérifier les déclarations de patrimoine, en ce sens que la Haute autorité de transparence, de prévention et de lutte contre la corruption sera dotée d’une « structure spécialisée habilitée à mener des enquêtes financières et administratives sur l’enrichissement illicite des fonctionnaires publics qui ne seront pas en mesure de justifier la source de l’augmentation de ces revenus et avoirs », a explique le ministre.

« Les enquêtes peuvent toucher toute personne potentiellement impliquée dans la dissimulation d’une richesse injustifiée d’un agent public, surtout s’il s’avère que ce dernier en est le véritable bénéficiaire », a-t-il ajouté.

L’instance peut – selon le même responsable – « demander des explications écrites ou orales à l’employé ou à la personne concernée, de même qu’elle est autorisée, dans le but de protéger les biens et conformément aux nouvelles dispositions, à demander au procureur de la République près le pôle économique et financier spécialisé du tribunal de Sidi M’hamed d’émettre des mesures conservatoires de saisie de biens ou de gel des comptes bancaires par décisions de justice rendues par le président du même tribunal, une décision susceptible d’appel dans le cadre de la consécration du droit de la défense ».

En ce qui concerne le fonctionnement de la nouvelle Autorité indépendante dédiée à la transparence et à la lutte contre la corruption et dont la création répond aux dispositions de la Constitution de 2020, le Garde des Sceaux  a expliqué que celle-ci est composée d’un président nommé par le Président de la République pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois, tandis que le renouvellement des membres de cette Haute autorité (12 membres) sera déterminé par un décret présidentiel pour un mandat de cinq ans non renouvelable. « Le projet de loi prévoit 40 articles et plusieurs principes, dont la non-interférence entre les pouvoirs de la Haute autorité et des autres autorités chargées de la prévention et de la lutte contre la corruption, notamment le pouvoir judiciaire et la Cour des comptes », précise-t-il.

Selon le projet de loi, « toute personne physique ou morale peut saisir la Haute autorité de faits de corruption (informations, données ou preuves) » et « pour être recevables, les plaintes ou signalements doivent être adressé(e)s par écrit, être signé(e)s et contenir des éléments sur les faits de corruption et des éléments suffisants sur l’identité de l’auteur du signalement ». « A travers ce nouveau mode de signalement, il s’agit d’en finir définitivement avec les signalements anonymes », a affirmé Tabi. Au titre de ses attributions, l’Autorité pourra recevoir et traiter les déclarations de patrimoine et veiller au respect par les administrations publiques, les collectivités locales, les établissements publics et économiques et les associations des dispositifs de transparence et de lutte contre la corruption, voire de s’assurer de l’existence, de l’efficacité et de la mise en œuvre de tels dispositifs. Elle peut également, de sa propre initiative ou après sa saisine concernant un manquement aux conditions de probité, prendre plusieurs mesures : adresser des avertissements au concerné et notifier le procureur général compétent en cas de non-déclaration du patrimoine ou de fausse déclaration. Cette autorité œuvrera à la promotion et au renforcement du rôle de la société civile dans la lutte contre la corruption par la mise en place d’un réseau favorisant la transparence dans l’organisation des activités caritatives, religieuses, culturelles et sportives des établissements publics et privés. 

Samira Ghrib

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