Les experts alertent quant aux conséquences du conflit en Ukraine : Vers une crise mondiale du blé !
La crise en Europe de l’Est risque de s’aggraver davantage et de prendre des proportions alarmantes, et affectesérieusement deux secteurs économiques névralgiques, l’énergie et le blé.
Les retombées du conflit entre la Russie et l’Ukraine prennent de l’ampleur, se répercutant négativement sur le marché mondial. Les sanctions prononcées par l’Occident contre la Russie ont été «contrecarrées» par des «contre-mesures» annoncées par la Russie qui a décidé de la cessation des exportations de blé jusqu’au mois d’août prochain. Ce qui ne sera pas sans conséquences sur les marchés mondiaux. Dans ce contexte, l’agroéconomiste, Ali Daoudi, a estimé que « le contexte géopolitique actuel montre que l’arme alimentaire » est une menace brandie par les grandes puissances mondiales, qui ont bien compris que la souveraineté agricole devient un attribut qu’il faut maitriser ». S’exprimant sur les ondes de la Radio algérienne, l’agroéconomiste fera savoir que « la situation risque de se corser encore plus ». D’ailleurs, il craint que le conflit entre l’Ukraine et la Russie, deux grands pays producteurs de céréales et d’oléagineux, ne perturbe l’offre mondiale sur le marché. Le Pr Daoudi prédit «une hausse de la demande mondiale avec une offre qui aura du mal à suivre et des crises de plus en plus fréquentes », appelant «à se préparer à ce type de scénarios. En ce sens, il recommande «la création d’une Agence de sécurité alimentaire : un organe qui serait indépendant, qui ne subirait pas la pression des décisions à court terme et pourra accompagner les gouvernements successifs dans la mise en œuvre d’une stratégie agricole à long terme». De plus, explique, Ali Daoudi en s’inquiétant «d’une annonce récente de la Chine concernant des conditions climatiques défavorables et d’une forte probabilité d’une faible récolte, ce qui annonce, selon lui, «le retour de la Chine sur le marché mondial en termes d’achats». La forte demande risque de ne pas être satisfaite. «Si ces prévisions se confirment, on risque d’avoir une demande supérieure de la Chine sur le marché mondial, même si, par ailleurs, les Etats-Unis ont rassuré, de leur côté, sur les tendances de la production pour l’année en cours», relève le Pr Daoudi. L’enjeu est d’autant plus important et est marqué par un contexte géopolitique particulier que la souveraineté agricole devient un attribut qu’il faut maitriser». L’agroéconomiste affirme que «l’Algérie a tout intérêt à se doter d’une véritable politique de sécurité alimentaire». Le professeur à l’Institut national d’agronomie (INA) déplore que «les plans d’actions ne s’inscrivent pas dans une vision claire avec des moyens suffisants ». Il appelle à « augmenter le budget consacré au développement de l’agriculture et à l’utiliser plus efficacement, à travers une stratégie claire et des instruments évalués régulièrement pour l’élaboration desquels les agriculteurs doivent être impliqués».
Pas de pénurie en Algérie
Pour ce spécialiste, impliquer les acteurs du monde agricole dans l’élaboration et la mise en œuvre de la stratégie de développement du secteur permettra, en outre, de les intégrer dans la sphère formelle de l’économie et d’améliorer le rendement agricole. L’expert exclut tout de même que la pénurie sévisse l’Algérie. Il n’en demeure que cette crise impactera les prix d’achat et de l’importation des blés. Il s’attend à une hausse de la facture d’importation des céréales. Pour autant, il estime que «les gains consécutifs à la hausse des cours du pétrole permettent à l’Algérie de supporter la hausse des prix, qu’il qualifie d’inédite». «A partir de 2015, les prix se sont stabilisés autour de 150 dollars la tonne de blé, alors qu’aujourd’hui, ils sont à 380 voire 400 dollars la tonne. Cette hausse des prix a débuté en 2021, mais elle s’est accentuée et a connu une forte accélération à partir de février et mars de cette année », explique le Pr Daoudi. L’expert décrit des conditions géopolitiques qui ont fortement perturbé le fonctionnement du marché mondial, et d’une manière assez inédite ces quinze dernières années, où « les prix ont atteint des niveaux très élevés, qu’ils n’avaient pas atteint depuis 2008, ce qui fait craindre des situations de pénurie». De cet épisode difficile, l’expert appelle à retenir les leçons: « d’abord, la fin définitive de la période d’abondance et de prix bas des produits agricoles sur le marché mondial».
Salim Abdenour
