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Les prix ont flambé sur les marchés spots : Ça gaze pour le gaz !

Le marché du gaz s’emballe. L’annonce de nouvelles coupes dans les livraisons de gaz russe via le pipe North Stream a mis les marchés sous pression et induit une nouvelle explosion des prix sur les marchés spots. 

En hausse depuis lundi, les prix du gaz ont renoué avec les records hier en atteignant un plus haut niveau historique depuis le mois de mars dernier lorsque les cours avaient dépassé les 300 euros le TTF. Ainsi, et après l’annonce la veille de nouvelles coupes drastiques des livraisons annoncées par le groupe russe Gazprom, le TTF néerlandais, la référence du gaz naturel en Europe, évoluait dans la matinée à 192,00 euros le mégawatheure (MWh). Sur le marché britannique, les prix évoluaient à 356,99 pence par thermie après un pic à plus de 357 pence, également un plus haut niveau depuis son record historique de mars. Gazprom a annoncé lundi qu’il réduirait dès aujourd’hui, à 33 millions de m³ quotidiens, les livraisons de gaz russe à l’Europe via North Stream, ce qui  réduit à environ 20% les capacités du gazoduc,  en raison de la nécessité de maintenance d’une turbine, explique-t-il. Moscou prend de nouveau de cours l’Union européenne dans la mesure où cette réduction des livraisons intervient au moment où les pays européens espéraient reconstituer leurs stocks de gaz en prévision de l’hiver, mais aussi pour correspondre à l’objectif politique de réduire leur dépendance au gaz russe d’ici à la fin de l’année. Des objectifs qui semblent compromis, d’autant que la réduction drastique et continue des livraisons par Gazprom met en péril la sécurité de l’approvisionnement énergétique pour l’hiver prochain. L’Europe qui a d’abord tablé sur la diversification de l’approvisionnement dans un premier temps se rabat aujourd’hui sur des objectifs de réduction de la consommation face au manque d’alternatives. 

C’est ainsi que l’Union européenne a annoncé hier un accord à l’arraché sur un plan de réduction de 15% de la consommation d’énergie proposé par la présidente de la commission européenne Ursula Von der Leyen. Un accord qui n’était pas évident au départ en raison de la levée de boucliers de certains États membres, notamment l’Espagne, le Portugal et la Grèce. Et malgré l’entente de principe des ministres de l’Énergie des 27, celle-ci fait face à de nombreux défis. Un accord a minima sur une réduction de la consommation de gaz devra être réduite de 15% par rapport à la moyenne des cinq derniers hivers et qui court du 1er août au 31 mars prochains. La consommation des ménages ne devra pas être affectée et concernera les entreprises et les administrations. Si ces réductions volontaires ne suffisent pas face à une crise imprévue, la Commission pourra proposer d’activer des réductions obligatoires. Un accord qui mise aussi sur « le principe de la solidarité européenne » pour réexporter le gaz économisé afin de soutenir les pays les plus dépendants du gaz russe, à l’image de l’Allemagne. Un principe qui n’est pas évident à respecter car cet accord a été arraché au prix de dérogations au profit de Chypre, Malte et l’Irlande, États insulaires qui ne sont pas connectés aux gazoducs du continent et d’exemptions partielles pour la Grèce, l’Espagne et le Portugal qui avaient argué au cours des derniers jours le fait d’être moins « exposés » au gaz russe et qu’ils ne pouvaient se permettre de soumettre leur industrie à ce plan d’austérité énergétique au risque de plomber leur économie. 

Malgré ces concessions, l’accord fait toujours divergence au sein de l’Union et devra faire face à l’épreuve du terrain. D’ailleurs, la Hongrie et par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Peter Szijjarto, a considéré que « c’est une proposition injustifiable, inutile, inapplicable et nuisible qui ignore complètement les intérêts nationaux. Il a jugé « la base légale douteuse », affirmant que la sécurité de l’approvisionnement énergétique relevait de « la responsabilité des gouvernements nationaux ». Un propos qui illustre d’ailleurs les défis des politiques européennes face aux politiques et intérêts des États membres. Les Hongrois ont d’ailleurs joint la parole à l’acte.  Peter Szijjarto s’est rendu la semaine dernière à Moscou afin de discuter de l’achat de 700 millions de mètres cubes supplémentaires de gaz qui viendraient s’ajouter aux 4,5 milliards livrés chaque année à Budapest avant le conflit en Ukraine.

Samira Ghrib

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