ContributionDébats

Reconfiguration des relations internationales : Quelles perspectives pour l’économie algérienne ?

Abderrahmane Mebtoul

Professeur des universités, expert international docteur d’ Etat

Une loi des finances n’est qu’un document comptable retraçant les dépenses et les recettes au cours d’une année et que l’important est de l’inscrire la dynamique du pays a sein d’une planification stratégique.

Faceà la nouvelle reconfigurationmondiale,avec les tensions en Ukraineet en Asie , des rivalités USA/Chine etle réchauffement climatique, nous orientantvers un Monde multipolaire,reposant sur la transition numériqueet énergétique , il s’agit pour les décideurs algériens d’analyser sans complaisance, ni sinistrose, ni autosatisfaction,la structureactuelle de l’économie algérienne afin d’éviter les erreurs du passé et dépenser sans compter. Rappelons qu’une loi des finances n’est qu’un document comptableretraçant les dépenses et les recettes au cours d’une année et que l’important est de l’inscrire la dynamique du pays a sein d’une planification stratégique.

1- L’Algérie est toujours attentive aucours du pétrole et du gaz qui détermine fondamentalement , le taux de croissance via la dépense publique, le taux d’emploi et le niveau de réserves de change,(98% des recettes en devisesy compris les dérivées inclus dans la rubriquehors hydrocarbures pour plus de 60%). Un baril coté le 16 novembre 2022 12h GMT à 93,12 dollars le Brent et à 85,8 dollars le WTI. En ce qui concerne le gaz,(plus de 33% des recettes en devises de Sonatrach), le prix du MWh en France sur le marché du PEG était de 112,05 €/MWh en octobre 2022, contre 151,91 €/MWh en septembre 2022,`contre350 euros le mégawattheureen aout 2022avec un cours euro/dollar le 16/11/2022de1,0415 dollar un euro. Cette dépréciation de l’euro a poureffetune dépréciation des réserves de change libellées en euros mais un gain pour les importations provenant de la zone euro , mais devant pondérer par le tauxde l’inflation mondiale des produits importésqui connaît un niveau record , avec de vives tensions sociales, expliquant la hausse des taux d’intérêts directeurs des banques centrales, mais qui risquent de freiner l’activité économique. Le PDG de Sonatrach aannoncé desrecettes de plus de 50 milliards de dollars. Encore faudrait-il précisersi dans le montant des 50 milliards l’on inclut les dérivés d’hydrocarburesinclus par le Ministère du commercedans la rubriquehors hydrocarbures ne devant pasfaire un double emploi.Selon le ministre des Finances, lors de sa présentation devant le Parlement,sur la base des recettes et dépenses prévisionnelles, le déficit global sera de -5467 milliards DA, soit39,4 milliards de dollars USD ( le calcul du déficitvariant selon le coursdollar/dinar) représentant22,5 % du PIB.Celamontre que le prix fixé par la loi de financesde 50 dollars pour la loi de finances 2022et 60 dollars pour celle de 2023est un artifice comptable, l’Algérie selon le FMI dans son rapport d‘octobre 2022 pour l’équilibre du budget devant avoir un cours moyen du barilde150 dollars. Outre d’autres facteurs commel’inflation importée,(la facture d’importation de biens et d’équipement devant être pondéré d’au moins 20/30% sinon plus comme la facture alimentaire, la faiblesse de la production et de la productivité, les surfacturations, cette dépréciation du dinaraccentuel’inflation interne qui entre janvier et novembre2022 dépasse les 10% , pour certains produitset entre 50 et 100% comme les pièces détachées, avec des incidences sur le pouvoir d’achat, laminant les couches moyennes qui rejoignent les couches défavorisées. Les prévisions de la loi de finances 2023 sont optimistes, l’estimant à 5,3% en rappelant quel’indice de l’ONS n’a pas été réactualisé alors que le besoin est évolutif, historiquementdaté.Par ailleurs comme pour le calculdu taux de croissance, un taux d’inflation faibleen T1 calculé parrapport à un taux d’inflation élevé en T0 donne cumulé un taux d’inflation élevé influant sur le taux d’intérêt des banques primaires qui doivent ajusterleur tauxà deux au moins pour éviterdes recapitalisations.Grâce notamment à l’évolution positive du cours des hydrocarbures et la dépense publique, le produit intérieur brut fin 2021 est de 160 milliards de dollars avec une prévision 180 en 2022, un taux de croissancede 4,7% prévu par le FMI contre une prévision initiale de 2,3% . Pour une croissance durable et des exportations hors hydrocarbures, il fautavoir des entreprises publiques et privées compétitives (coûts/qualité) dans le cadre des nouveaux avantages comparatifs mondiaux : sinon c’est comme un stade de 200.000 places sans joueurs , se limitant comme parle passé à être toujours une économie rentière.

En ce qui concerne le développement des PMI/PME . En ce qui concerne la création d’une PME, aprèstoutes les formalités administratives et sa réalisationil fauttrois ans minimum pour son parachèvement, T- 3et ensuite , il fauttrois à quatreans à partir de son fonctionnementpour atteindre le seuil de rentabilitéetpour les projets hautement capitalistiques, créant peu d’emplois,il faut entre5/7 ans, toutcela devant être encadrépar de profondes réformesinstitutionnelles, socialeset économiques, le cancer du blocage étant le terrorisme bureaucratique qui engendre la corruption.

2- La population au 01 janvier 2022est estimé à45 millions d’habitants pour une projection de plus de 50 millions à l’horizon 2030, avec une population active d’environ13 millions et un taux de chômage selon le FMI14% incluant les emplois de la sphère informelleet les sureffectifs dans l’administration, devantcréer entre 350.000/400.000 emplois par an. Avec un lien dialectique entre sécurité et développement cela nécessite un taux de croissancede 8/9% sur plusieurs années pour atténuer les tensions sociales . Celles-ci sont atténuéespar lestransferts sociaux quireprésentent pour le PFL 2023, plus de5000 milliards de dinars soit plus de35,71 milliards de dollars au cours de 140 dinars pour un dollar, montrant le caractèreredistributif de la richesserentière sans ciblage , celui qui perçoit 300.000 dinars par mois bénéficient des mêmes subventions que celui qui perçoit plus de 20.000. dinars.La sphère informelle qui sertde tampon social , l’emploi y représenteenviron 40% de la population activecanaliseentre 33 et 45% de la masse monétaire en circulation, le présidentde la République algérien l’ayant estimé fin 2020 entre 6000 et 10.000 milliards de dinars. Selon la Banque d’Algérie entre 2019/2020,la masse monétaire circulant en dehors du circuit bancaire, avaitatteint 6140,7 milliards de dinars (près de 47,23 milliards de dollars au cours de 130 dinars un dollar de l’époque ) soitune hausse de 12,93% par rapport à 2019. Sansune maitrise de cette sphère, il estdifficilede savoir qui est véritablementchômeurpouvant poser problème pour les actions récentesde l‘allocation chômage.Toutefois,l’Algérie a des marges de manœuvres,lestock de la dette extérieure étantrelativement faible,estimé à fin 2020 de5,178 milliards de dollars contre 5,492 en 2019 selonle rapport International Debt Statistics 2022de la Banque mondiale et la dette extérieurea étéde 2.4% en 2020,de 6.5% en 2021 et une projectionde 7.7% en 2022. Mais avec un accroissement de la dette publiqueinterne, encoresoutenable, ayant représenté50.7% du PIB en 2020,59.2% du PIB en 2021 etune projectionde 65.4% en 2022 .Les réserves de changeont évolué en2002 à23,1 milliards de dollars eten 2013de 194,0 milliards de dollars.Depuis 2019, il y a eu une restriction drastiquedes importations en devises qui a paralysébon nombre de secteurs économiques, certaines unités fonctionnant à 50% de leurs capacités du fait que le taux d’intégration des entreprises publiques et privéesne dépasse pas15/20% ,85% des matières premières et équipements provenant de l’extérieur en devises. Ainsi en2019, le niveau des réserves change avait atteint62 milliards de dollars ,fin 2021 44 milliards etle ministre des Finances l’estimant sur la base d’une excédent de labalance commerciale fin 2022 de 17 milliards de dollars à 54,5 milliards de dollars. Liée au niveau des réserves de change à plus de 70%, comme toute économie rentière la cotation du dinars officiel a été de 4/5 dinars pour un dollar vers les années 1970,( cotation administrative), une cotation collant avec le niveau du marchédepuis le rééchelonnent avec le FMI vers les années 1994/1995, ,en 1999 : 66,64 dinars un dollar -2001 : 77,26 dinars un dollar 69,20 dinars un euro : -2005, 73,36 dinars un dollar, 91,32 dinars un euro : – 2010, 74,31 dinars un dollar et 103,49 dinars un euro : -2015, 100,46 dinars un dollar et 111,44 dinars un euro-2020 : 128,31 dinars pour 1 USD et 161,85 dinars pour 1 euro –14 janvier 2021132,77 dinars et 161,13 dinars un euro ;le16 novembre2022 , cours achat138, 2158 dinars un dollar et 143, 8638 dinars un euro.La Banque d’Algérie procède au glissement du dinar par rapport au dollar et à l’euro afin d’augmenter artificiellement la fiscalité hydrocarbures (reconversion des exportation hydrocarbures en dinars) et la fiscalité ordinaire (via les importations tant en dollars qu’en euros convertis en dinar dévalué), cette dernière accentuant l’inflation des produits importés (équipements, matières premières, biens finaux), montant accentué par la taxe à la douane s’appliquant à la valeur dinar, étant supportée en fin de parcours, par le consommateur comme un impôt indirect, l’entreprise ne pouvant supporter ces mesures que si elle améliore sa productivité.Nous avonsun grand écart sur le marché parallèle cours vente , 218/220 dinars un euro/dollar.Cet écart est une des causesqui favorise les surfacturations et lesactions spéculatives, qui préfèrent spéculer sur le cours des devises plutôt que d’investir.

En conclusion, l’Algérie doit profiter de cette conjoncture particulière qui ne durera pas ayant des marges de manœuvres, ne devant jamais oublier que le pilier du développement est la bonne gouvernance et la valorisation du savoir, devant forcément réaliser la transition numérique et énergétique ( sobriété énergétique, développement desénergies renouvelables et de l’hydrogène vert) où le réchauffement climatique entre 2022/2030 sera de plus en plus intense en Afrique,, incendies, sécheresse ,pluies diluviennes , disparitionde villes des côtes avec la hausse du niveau desmers, avec des impacts sur la crisealimentaire et la crise de l’eau douce pouvant conduire àdes guerres ).Le coût estimé paran pour l’Algérie étant évalué entre 5/10 milliards de dollars par an , l’Algérie ayant pris consciencede ces effets pervers préjudiciableà l’avenir de l’humanité,par la mise enplace de mécanismesde protection (voir le débat Pr Abderrahmane Mebtoul Radio Beur/Fm Parisle 30/10/2022 17h sur l’Algérie face aux enjeux géostratégiques et TV- LCP Paris chaine parlementaire sur le réchauffement climatique et la sécurité mondiale a étédiffusée le 31 octobre 2022 à 23h30 en présence de plusieurs experts disponible du YouTube ). Depuis fort longtemps, l’Algérie semble chavirer un moment et reprendre avec hésitation ses équilibres à un autre moment. Pourtant, au-dessus de tout, l’Algérie reste un pays dynamique, plein de vitalité, qui se cherche et cherche sa voie. La nouvelle architecture des relations internationales , pour aller vers une nouvelle République, impose àl’Algérie des stratégies d’adaptation,tenant compte de notre riche histoire car l’histoire est le fondement de la connaissance et de l’action future. L’Algérie et cela est reconnu par la majorité de la communauté internationale, fait face aux nouveaux enjeux du mondeales potentialités sous réserve d’une nouvelle gouvernance et la valorisation du savoir pour devenir un acteur stratégique tant sur le plan militaire et sécuritaire, énergétique et économiqueau niveau de l’espace méditerranéen et africain.

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