Agriculture : Cap sur la modernisation
L’Algérie avance à pas sûrs vers une refondation de son modèle agricole. Entre intensification de la production, soutien accru aux filières stratégiques et modernisation des outils, le ministère de l’Agriculture, du Développement rural et de la Pêche place 2026 sous le signe d’une agriculture performante, durable et technologiquement ancrée. À l’occasion de la présentation du projet de loi de finances devant la Commission des finances de l’Assemblée populaire nationale (APN), le ministre Yacine El-Mahdi Oualid a détaillé une feuille de route ambitieuse, tournée vers la sécurité alimentaire nationale et la valorisation du potentiel du territoire. « Le secteur avance à pas sûrs selon une vision prospective et une stratégie claire », a-t-il affirmé, rappelant que cette dynamique s’appuie sur la participation de toutes les compétences nationales, « afin de faire de l’agriculture un levier économique reposant sur la numérisation et la technologie ». Le ministre a souligné que son département accordait « une importance majeure à l’intensification de la production nationale et au soutien aux filières stratégiques », à travers une batterie de mesures visant à renforcer la productivité, la formation et la modernisation des pratiques agricoles. L’effort portera notamment sur « le soutien aux intrants tels que les semences et les engrais, le développement de l’irrigation agricole et de la mécanisation, l’encadrement technique et la régulation des revenus des agriculteurs ». L’objectif est clair : réduire la dépendance vis-à-vis des importations, notamment de céréales et de légumineuses, en augmentant la productivité et le rendement des terres cultivées. Le ministère table aussi sur l’extension des superficies irriguées et la généralisation de systèmes économes en eau. L’agriculture saharienne figure parmi les priorités, avec la mise en valeur de vastes périmètres dans le Sud, désenclavés et raccordés à l’électricité. « Le raccordement des exploitations agricoles aux réseaux électriques est un axe stratégique », a insisté M. Oualid, évoquant plus de 100.000 exploitations déjà alimentées en énergie, selon le dernier Conseil des ministres.
Des investissements massifs pour les filières stratégiques
Les moyens financiers suivent cette ambition. Le portefeuille du secteur bénéficiera, dans le cadre du PLF 2026, d’une autorisation d’engagement de 764,264 milliards de dinars, dont 90% alloués à l’agriculture et au développement rural. Les crédits de paiement atteignent 886,452 milliards de dinars, destinés à de grands projets d’investissement : renforcement des capacités de stockage, électrification du Sud, appui aux filières céréalières et oléagineuses. La priorité ira au développement de cultures stratégiques comme le blé dur, le maïs ou le colza oléagineux, mais aussi à l’appui à la filière laitière. La contribution de l’État aux offices interprofessionnels du lait (ONIL) et des céréales (OAIC) atteindra 427,728 milliards de dinars, soit près de 79% des dépenses de transfert, « afin de soutenir le pouvoir d’achat des citoyens », a précisé le ministre. Parallèlement, des programmes structurants verront le jour : cinq nouveaux silos de stockage de céréales d’une capacité totale de cinq millions de quintaux seront réalisés, ainsi que dix centres de stockage de poudre de lait. Trente silos à long terme et 350 centres de proximité sont en voie d’achèvement à travers les 52 wilayas.
L’agriculture ne se conçoit plus sans la durabilité environnementale. En témoigne la relance du barrage vert, programme emblématique de lutte contre la désertification, doté de 12 milliards de dinars pour 2026 et couvrant 13 wilayas. En parallèle, 1,18 milliard de dinars sera consacré à la lutte contre les incendies, avec l’acquisition de nouveaux camions-citernes, véhicules légers et kits de prévention. Le secteur de la pêche et de l’aquaculture bénéficiera également d’une enveloppe spécifique pour le recensement général et la numérisation du secteur, appuyée par l’acquisition de simulateurs de navigation et de pêche destinés aux écoles de formation.
Vers une nouvelle loi d’orientation agricole
Au-delà des chiffres, c’est toute une organisation du secteur qui se prépare. Le président de la République a instruit dimanche en Conseil des ministres le ministre de l’Agriculture de « préparer un nouveau projet de loi d’orientation agricole pour une organisation définitive du secteur selon une vision prospective associant des spécialistes ». Cette future loi vise à encadrer durablement la transformation du modèle agricole, en conciliant performance économique, justice sociale et souveraineté alimentaire. Le chef de l’État a également ordonné « l’importation immédiate de moissonneuses et de matériels de semis », y compris des machines de moins de cinq ans pour la récolte du maïs et des graines oléagineuses. Une mesure qui répond à l’urgence de moderniser les équipements pour faire face au défi de semer et récolter plus vite sur près de 7 millions d’hectares de terres céréalières. La mécanisation, déjà amorcée par la production locale de moissonneuses-batteuses sous licence Sampo, sera ainsi renforcée par une diversification du matériel et des usages.
L’introduction de semoirs modernes, capables de réduire les pertes et d’améliorer la résistance des cultures à la sécheresse, s’inscrit dans cette logique d’efficacité et d’adaptation climatique. Dans certaines filières, comme la tomate industrielle ou la pomme de terre, la mécanisation a déjà permis de réduire la pénibilité et les coûts de production.
Une agriculture du futur, entre savoir-faire et technologie Soutien aux intrants, numérisation, électrification, mécanisation, développement durable : l’Algérie trace les contours d’une nouvelle agriculture, performante et inclusive. Pour Yacine El-Mahdi Oualid, la modernisation du secteur repose sur un équilibre entre innovation et valorisation du savoir-faire national : « Nous avançons avec confiance vers la sécurité alimentaire du pays, grâce à la contribution de tous, sans aucune exclusion ».
Sabrina Aziouez

