Le nombre de saisies explose : La contrefaçon, une menace pour l’économie nationale !
Le phénomène de la contrefaçon prend une ampleur inédite en Algérie. Les services des Douanes ont saisi 387 026 articles falsifiés au cours des neuf premiers mois de 2025, contre seulement 83 648 sur toute l’année 2024. Un bond spectaculaire qui traduit à la fois la montée du trafic de produits illicites et le renforcement du contrôle aux frontières. Derrière ces chiffres, se dessine une menace persistante pour l’économie nationale, les entreprises locales et la santé des consommateurs.
Lors d’un séminaire international consacré à la lutte contre la contrefaçon, organisé à Alger, Celia Hakimi, cheffe du bureau de lutte contre la contrefaçon à la Direction générale des Douanes (DGD), a détaillé l’ampleur du fléau. « Les produits saisis sont constitués principalement de logos (36,1 %), de dentifrices (33,4 %), de vêtements (20,1 %) et de chaussures de sport (6,1 %) », a-t-elle indiqué, précisant que la majorité provenait de Chine et de Turquie. Ces articles contrefaits, souvent vendus à bas prix sur les marchés informels, concurrencent directement les marques nationales et étrangères opérant légalement sur le territoire. En 2024, les Douanes avaient intercepté essentiellement des tiges de chaussures de sport (66 %), des tenues pour enfants (13 %) et des pièces de rechange (13 %), également en provenance de ces deux pays. Les opérations ont été menées « à la fois sur demande des titulaires de droits et à l’initiative des services douaniers », a précisé Mme Hakimi. Depuis le lancement, en 2007, du dispositif spécifique de saisie des produits contrefaits, près de 15 millions d’articles ont été interceptés, « à la suite de 778 demandes d’intervention ayant entraîné 584 alertes ». La responsable a rappelé que la lutte contre la contrefaçon repose sur un cadre juridique clair. « Les marchandises portant atteinte aux droits de propriété intellectuelle sont interdites à l’importation comme à l’exportation », a-t-elle indiqué, citant les dispositions du Code des Douanes et de l’arrêté ministériel du 15 juillet 2002, qui fixe les modalités et délais de rétention des marchandises suspectes. Elle a insisté sur « la nécessité de renforcer la coopération et l’échange d’informations entre institutions » et sur « l’importance de la sensibilisation et de l’amélioration du cadre juridique ». Au cours des trois premiers trimestres de 2025, les Douanes ont enregistré 29 demandes d’intervention et 28 alertes. Mme Hakimi a souligné « le rôle central des Douanes dans la lutte contre la contrefaçon aux frontières » et l’importance d’un dispositif « rigoureux et coordonné » avec les autres institutions concernées.
De son côté, Toufik Bouzina, chargé des litiges à l’Institut national algérien de la propriété industrielle (INAPI), a présenté les statistiques liées aux contentieux civils relatifs à la contrefaçon de marques, brevets et modèles. « En 2024, l’INAPI a enregistré 78 litiges, contre 59 en 2023 », a-t-il précisé. L’Institut a également traité 233 demandes d’information en 2024, dont 158 émanant de la Sûreté nationale, 132 de la Gendarmerie nationale, 48 des Douanes et 2 des directions du commerce. M. Bouzina a par ailleurs évoqué « les défis posés par l’ère numérique et l’intelligence artificielle », qui « facilitent la prolifération des contrefaçons en ligne et compliquent la traçabilité des infractions au-delà des frontières numériques ». Il a également souligné « le flou juridique persistant quant aux responsabilités liées aux créations générées par l’intelligence artificielle ». Les intervenants ont alerté sur les risques économiques et sociaux de la contrefaçon, rappelant qu’elle « cause des pertes financières à l’État et aux entreprises, met en danger la santé des consommateurs et alimente l’économie informelle ». Organisé sous le thème « Dangers et solutions dans la lutte anti-contrefaçon », le séminaire a réuni des responsables d’organismes publics, des institutions internationales et des experts nationaux et étrangers. Les travaux ont porté sur la coopération public-privé, la propriété intellectuelle à l’ère des technologies émergentes et l’usage de la technologie pour la protection des marques et la régulation du marché.
Malik Meziane

