« La gare Aïn Lahdjar » de Lotfi Bouchouchi : Une comédie dramatique en tournée dans tout le pays
« La gare Aïn Lahdjar », le dernier long métrage de Lotfi Bouchouchi sillonne actuellement les salles obscures du territoire national.
Depuis le 30 mai, cette production locale investit les écrans d’Alger, d’Oran et de Constantine, offrant au public algérien une œuvre qui mélange habilement satire sociale et humanité. La société de distribution MD Cine orchestre cette tournée nationale qui témoigne de l’appétit retrouvé pour les productions locales, dans un contexte où le septième art algérien cherche à reconquérir son public. Fruit d’une collaboration entre Studio DS et le Centre algérien de développement du cinéma sous l’égide du ministère de la Culture et des Arts, ce film de 90 minutes puise sa force dans l’adaptation que Lotfi Bouchouchi a réalisée du texte de Rachid Benbrahim. Le réalisateur, déjà reconnu pour sa capacité à croquer la société algérienne avec justesse, livre ici une fable contemporaine qui résonne particulièrement avec les préoccupations actuelles. L’histoire se déroule dans le village fictif d’Aïn Lahdjar, un microcosme social isolé où les habitants gravitent autour d’une gare désaffectée, leur unique lien avec le monde extérieur.
Cette gare, véritable métaphore de l’espoir et de l’attente, cristallise tous les enjeux du récit. Les villageois s’efforcent de remettre en service cette station ferroviaire qui représente bien plus qu’un simple moyen de transport : elle incarne leur désir de connexion, de progrès et d’ouverture sur l’extérieur. Mais comme souvent dans la réalité, les bonnes intentions se heurtent aux divergences humaines, parfois teintées de malveillance, créant un cocktail explosif que Bouchouchi exploite avec un sens aigu de l’observation sociale.
Le ton satirique et humoristique choisi par le réalisateur permet d’aborder des sujets sensibles sans tomber dans la lourdeur moralisatrice. Cette approche, qui révèle « les échecs de la société, à une époque de grands défis », selon la présentation officielle, fait écho aux questionnements contemporains sur la cohésion sociale et les difficultés de développement dans les zones rurales. Le film parvient ainsi à transformer un sujet potentiellement grave en une comédie dramatique accessible, sans pour autant édulcorer son propos.
La distribution réunit une pléiade d’artistes confirmés du paysage cinématographique et théâtral algérien. Nabil Asli, Houria Bahloul, Yakoub Guenfoud, Yasmine Kerkache, Kamel Rouini, Rachid Ben Goudifa, Mourad Saouli, Mabrouk Ferroudji, Ahmed Deloum et Mohamed Kadri composent un ensemble d’acteurs qui donnent chair à cette galerie de personnages hauts en couleur. Leur jeu, enrichi par les compositions musicales d’Aboubakr Maatallah, contribue à créer une atmosphère authentique qui ancre le récit dans une réalité palpable tout en préservant sa dimension universelle.
L’avant-première présentée en mai à la Cinémathèque d’Alger avait déjà donné le ton, révélant un film qui assume pleinement ses ambitions artistiques et sociales. Les projections se déroulent désormais dans les salles emblématiques du pays : Ibn Zeydoun, Ibn Kheldoun et Sahel à Alger, Ciné Gold à Oran, et Ahmed Bey à Constantine depuis le 3 juin. « La gare Aïn Lahdjar » s’inscrit dans une démarche de renouveau du cinéma algérien qui cherche à retrouver ses marques entre tradition narrative et modernité des enjeux abordés.
Mohand Seghir