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Massacre d’Oued Ch’hem : L’autre rappel du visage hideux du colonialisme

La plaque commémorative mise en place dans la municipalité d’Oued Chhem, à l’extrême est de Guelma, à la frontière administrative avec Souk Ahras, raconte depuis des générations les détails du massacre commis contre les habitants de la région, le mois de mai 1945. Cette plaque commémorative rappelle une autre page du registre noir des crimes commis par le colonisateur français remontant à 77 ans, et émouvant ceux les ayant vécus. Salah Labidi Boumaaza, né en 1930, un habitant de Machta, El Massen, qui est situé à environ 4 km du centre de cette municipalité, affirme que «monument immortalise une scène de l’horreur de ce qui s’est passé, comme il ancre la mémoire «des personnes tombés en martyres ». Ce fut dans la matinée du lundi 14 mai 1945 qu’ont été exécutés et brulés les Boutaraa Al-Touhami,  El Hadi  Hami, El Sassin, Azayziya Sadek, El-Aifa, Motbatab Rahim et Arbaoui Hocine. Âgé  de 15 ans lors de ces massacres, Aâmi Salah est aujourd’hui nonagénaire. Il se souvient encore, et avec une extrême précision, de ce massacre perpétré à cette date, contre un peuple désarmé. Tout a commencé depuis le rond-point El Kroura connu comme d’El Massen. Lors que la première étincelle a éclaté, la nouvelle est parvenue au marché de Hammam se tenant tous les jeudis, au sujet du soulèvement populaire qui a eu lieu dans la ville de Guelma et ses municipalités voisines le Mardi 8 mai 1945. Il a ajouté que «ceux qui ont été exécutés au lieu du mémorial étaient tous issus de la jeunesse de ce rond-point qui, dès qu’ils ont entendu les nouvelles venant de Guelma, se sont élevés, scandant des slogans d’indépendance, coupant toute cette distance qui les sépare du siège de la municipalité, et leur premier arrêt était « la ferme de François de Gaulle » où le colonel qui en était propriétaire s’est enfui pour tenir informé le reste des européens à Oued Chham sur la situation «Ce qui les a fait apporter leurs armes et commencer le meurtre aveugle contre tous les habitants de la région », témoigne Aami Salah. Il a ajouté que «le colonisateur français, avec ses soldats, la Gendarmerie, ses gardes champêtres et ses civils, s’est livré à des pratiques brutales dans les jours qui ont suivi ce soulèvement, tuant délibérément des gens sans distinction et sans discrimination entre un garçon, une femme ou un vieil homme avant de jeter leurs cadavres aux  bords des routes en plus de brûler toutes les huttes et les maisons dont les propriétaires sont soupçonnés de s’opposer à eux, y compris ma maison ». Aami Saleh a indiqué que lui et sa famille «ont fui vers le Hanancheh à Souk Ahras et n’en sont revenus que plus d’un mois plus tard. L’atrocité des pratiques ne s’est pas arrêtée là, mais a atteint toute la région, l’armée coloniale a utilisé des avions de guerre pendant plusieurs jours», se souvient toujours Aami Salah ,ajoutant que «les Français ont également procédé à un vol massif et au pillage de tous les troupeaux de moutons, de vaches ou de chèvres de la population comme châtiment et représailles à leur encontre, outre des dizaines d’hommes des douars ont été arrêtés et transférés à la préfecture de gendarmerie puis à Souk Ahras, avant d’être condamnés à Constantine à des peines de prison allant de 15 à 40 ans». Pour sa part, Abdellah Tarbak, né en 1933 et âgé d’environ 13 ans à l’époque, a indiqué que «les habitants de la région se sont rassemblés au centre de la municipalité exprimant leur enthousiasme pour le sacrifice au nom de l’indépendance après avoir entendu des nouvelles d’un soulèvement contre le colonialisme français», ajoutant que «les traces de balles qui subsistent encore sont à ce jour  de visu perceptibles sur le mur de l’ancien siège de la municipalité». Il témoigne encore de ce que  les Français ont fait, tiré au hasard  et à balles réelles contre des habitants rassemblés. Et d’ajouter se «souvenir encore bien des visages de certains de ceux qui ont été exécutés par un peloton d’exécution sur le site actuel du mémorial, leurs corps ont été jetés entre les arbres eucalyptus à côté du village », se rappelant également des pillage perpétrés par les français contre des habitations et des douars voisins et comme El Aouayade et El Dahwara. «Ils ont pillé les biens des populations, notamment les moutons, les vaches, les chèvres, les ânes et des chevaux, et brulé et vandalisé nos biens », se souvient éternellement Abdellah Tarbak. Fondée en 1995, l’association de wilaya du 8 mai 194 a pour objectif de lutter contre la culture de l’oubli. «N’oublions pas » est la devise de cette association qui indique que «la wilaya de Guelma compte plus de 18 000 martyrs victimes des massacres commis par le colonialisme français ». «Les tueries se sont poursuivies pendant plus de deux mois », résument les témoignages recueillis par les militants de l’association, celle-ci recense également  les sites qui ancrés dans la mémoire collective de tous les habitants de  la wilaya, dont le « four à chaux ». Destiné à la transformation de la chaux, ce four a servi de  véritable «crématorium humain » dans lequel des dizaines de corps ont été brûlés.  Des innocents non armés ont été tués par la gendarmerie, la police et les milices françaises. Et dans la commune d’Héliopolis également, le site de «Kaf al-Bomba » reste un autre témoin de la manière horrible. Des dizaines d’Algériens ont été abattus la chair de leur cadavres  a été dévorée par des animaux sauvages, d’autres ont été enterrés collectivement dans des charniers constitués de 4 tranchées de longueur variant entre 20 et 25 mètres. « 20 corps ont été enterrés dans chacune de ces fosses », a-t-on indiqué, en plus de plusieurs autres  sites a des histoires tristes, comme le Petit Pont dans la commune de Belkheir, où une famille a été exécutée avec tous ses membres, un enfant de 12 ans et une mère enceinte dans son sixième mois, l’oued Sebous dans la commune de Boumhra Ahmedine, où les Français ont tué les habitants et jetés leur cadavres dans La vallée, l’ancienne  caserne au centre de la ville de Guelma, qui contient encore les restes du guillotine en fer avec laquelle les participants à la marche pacifique ont été exécutés, en plus d’autres sites dans les municipalités de Lakhzara, Ain Larbi et Oued Chhem. 

Amar Malki

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