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Le Secrétaire d’Etat américain en tournée sur le continent : Washington tente de reprendre pied en Afrique

Se sentant distancés par la Chine et la Russie en Afrique, un continent dont l’administration Trump s’était complètement désintéressée, les Etats-Unis tentent de rattraper leur retard en proposant aux dirigeants africains un nouveau partenariat. Et c’est à Antony Blinken, le Secrétaire d’Etat américain, que la mission de renouer avec l’Afrique subsaharienne a été confiée par la Maison Blanche.

Lors d’une tournée entamée lundi en Afrique du sud et qui l’a mené en République démocratique du Congo (RDC) et au Rwanda, Blinken a cependant nié que son déplacement s’inscrit dans une logique de compétition ou de confrontation avec Pékin ou Moscou. « Les États-Unis n’essaient de surpasser personne», a déclaré Antony Blinken à la presse, ajoutant que Washington ne considérait pas l’Afrique comme le « dernier terrain de jeu dans une compétition entre grandes puissances ».

La tournée a pourtant été décrite par la presse occidentale comme une tentative de contrer les efforts récents de la Russie et de la Chine pour gagner en influence sur le continent. Le mois dernier, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, s’est rendu dans quatre pays, ralliant le soutien à l’invasion de l’Ukraine par Moscou.

Dans un long discours prononcé à l’université de Pretoria dans la capitale sud-africaine, le secrétaire d’État américain a appelé en revanche « les gouvernements, les communautés et les peuples » de toute l’Afrique à adopter la vision de Washington en matière de démocratie, d’ouverture et de partenariat économique. Il a annoncé également que les États-Unis allaient accueillir à nouveau à Washington un sommet Etats-Unis-Afrique, une initiative lancée par l’administration Obama mais abandonnée par son successeur Donald Trump. 

Bien qu’il n’y ait aucune mention directe de la Russie, le diplomate américain a tout de même évoqué le cas du groupe russe Wagner. Le responsable américain a plaidé pour la mise en place de forces de sécurité africaines plus efficaces et responsables et la lutte contre la marginalisation qui pousse souvent les gens vers des groupes criminels ou extrémistes ». « C’est la meilleure solution », a-t-il suggéré.

Dans son discours qui visait assurément aussi à contrer les accusations de néoimpérialisme, Blinken a souligné à plusieurs reprises que Washington voulait agir « en consultation avec les dirigeants et les communautés locales, renforçant les initiatives africaines existantes ». Il est aussi  évident que la visite de Blinken vise aussi à tenter de rapprocher la diplomatie sud-africaine du camp occidental.

Poids lourd du continent, l’Afrique du Sud a, rappelle-t-on, refusé de condamner l’opération russe en Ukraine, arguant qu’il y avait des fautes des deux côtés et que l’expansion de l’Otan était l’une des causes de la guerre. L’ANC a déclaré vouloir rester neutre afin de mieux encourager la paix. « Nous plaidons vraiment pour la paix », a indiqué Naledi Pandor, ministre sud-africaine des relations internationales, à son homologue américain.

Malgré l’accueil diplomatique chaleureux réservé à son visiteur, l’Afrique du Sud n’a donc pas semblé modifier sa position vis-à-vis de l’Ukraine. Pandor a également critiqué les États-Unis et d’autres puissances occidentales pour s’être concentrés sur le conflit ukrainien au détriment d’autres problèmes internationaux. « Nous devrions être également préoccupés par ce qui arrive au peuple palestinien », a déclaré Pandor lors d’un point de presse à l’issue de la rencontre avec Blinken.

Il faut dire que de nombreux Sud-Africains se souviennent de la façon dont Moscou a offert son soutien à des dizaines de mouvements de libération pendant la guerre froide, tandis que de nombreux décideurs américains considéraient le régime d’apartheid comme un rempart contre le communisme. Pretoria n’a également jamais digéré l’intervention militaire de l’OTAN en Libye en 2011. Elle s’était fait tordre le bras pour l’approuver alors qu’elle siégeait au Conseil de sécurité de l’ONU, avant de critiquer cette guerre et de pointer le doigt vers les Occidentaux pour avoir abusé de ce mandat pour faire tomber Mouammar El Gueddafi. Ceci pour dire qu’il ne sera pas du tout aisé à Antony Blinken et aux Etats-Unis de gagner la confiance des Africains qui n’ont connu que des relations tumultueuses avec les Occidentaux.

Khider Larbi

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