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Visite du Premier ministre italien, aujourd’hui à Alger : Le gaz et au-delà

Le Premier ministre italien, Mario Draghi, effectuera, aujourd’hui, une visite à Alger au cours de laquelle il aura des entretiens avec le président de la République, Abdelmadjid Tebboune. Une visite qui s’inscrit dans le sillage de la consolidation des relations entre l’Algérie et l’Italie et devrait être sanctionnée par la signature d’accords stratégiques, notamment dans le gaz et les énergies renouvelables. 

Le ballet diplomatique entre Rome et Alger s’accélère. Le Premier ministre italien, Mario Draghi, sera aujourd’hui à Alger pour une visite aux enjeux majeurs. Une visite qui fait suite d’ailleurs à celles de son ministre des Affaires étrangères, Luigi Di Maio, et d’une délégation du groupe énergétique italien, Eni, les jours suivants par son P-DG, Claudio Descalzi. Un ballet qui intervient dans un contexte particulier, marqué par des tensions sur le marché européen du gaz, dans le sillage du conflit en Ukraine. Il n’est un secret pour personne que l’Italie cherche à sécuriser ses approvisionnements en gaz et compte capitaliser les excellentes relations qu’elle entretient avec l’Algérie pour s’assurer une partie de ces approvisionnements. Des relations privilégiées, renforcées d’ailleurs par la signature en 2003 d’un traité d’amitié qui a posé les fondations d’un partenariat stratégique solide, et en 2020 d’un mémorandum d’entente sur le dialogue stratégique sur les relations bilatérales et les questions politiques et de sécurité globale.

Des relations qui n’ont fait depuis que se renforcer et se diversifier pour toucher divers secteurs dans le cadre d’un dialogue stratégique qui touche aussi bien les domaines économiques que les questions politiques et la lutte contre le terrorisme. La visite du président italien, Sergio Mattarella, au mois de novembre dernier en Algérie, s’était inscrite dans le cadre de la consolidation de ce partenariat pour toucher toutes les questions d’intérêt commun et de se pencher sur le partenariat dans le domaine de la culture.

Sur le plan économique, l’Algérie et l’Italie entretiennent des rapports particuliers. Les échanges commerciaux entre les deux pays ont été estimés en 2020 à 6 milliards de dollars. L’Italie est le troisième fournisseur de l’Algérie après la Chine et la France. Elle est également le premier client, notamment pour ce qui est du gaz qui transite par le gazoduc Transmed rebaptisé du nom d’Enrico Mattei, fondateur du groupe Eni et l’un des plus grands soutiens de la guerre de libération nationale. 

Il est vrai que cette visite permettra de passer en revue divers domaines de coopération, notamment les questions internationales et régionales. Les médias italiens ont également indiqué que cette visite sera l’occasion de jeter les bases du prochain sommet intergouvernemental algéro-italien prévu à Alger dans les prochains mois, et ce, après la visite d’Etat que le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, doit effectuer en Italie au mois de mai prochain.

4 milliards m3 de gaz en plus

Il est cependant clair que le déplacement de Mario Draghi à Alger aura pour objectif d’acter l’engagement de la Sonatrach de fournir plus de gaz à l’Italie. D’ailleurs, un accord stratégique sur l’énergie devra être signé entre Alger et Rome aujourd’hui, affirme les agences de presse internationales, Reuters et Bloomberg, qui citent des sources proches du Palais Chigi. Un accord qui comprend également des co-investissements dans des projets d’énergie renouvelable. Et de préciser que Draghi arrivera à Alger accompagné d’une importante délégation qui comptera le ministre des Affaires étrangères, Luigi Di Maio et le ministre de la transition énergétique, Roberto Cingolani, ainsi que le P-DG d’Eni, Claudio Descalzi.

Ce dernier était d’ailleurs la semaine dernière à Alger. Une visite au cours de laquelle la Sonatrach avait annoncé sa disposition à livrer des quantités supplémentaires de gaz à l’Italie. Il est vrai que cet accord permettra à la Sonatrach de consolider sa position sur son marché traditionnel, l’Italie qui demeure son premier client. Or, le débat tourne aujourd’hui sur les quantités supplémentaires à livrer. L’Algérie livre du gaz à l’Italie depuis 1983 via le gazoduc Enrico Mattei et dont la capacité de transport a été portée, il y a quelques années, à 32 milliards de m3 par an. Une infrastructure qui demeure largement sous exploitée et qui laisse de la marge. En effet, l’Italie a importé plus de 21,2 milliards de m3 de gaz algérien en 2021. Les Italiens espèrent aussi s’assurer la livraison de 9 à 10 milliards de m3 de gaz supplémentaires par l’Algérie sur une base annuel. Dans une telle situation l’Algérie pourrait se hisser à la position de premier fournisseur de gaz de l’Italie et couvrir plus de 40% des 75 milliards de m3 de gaz consommés en Italie. Des perspectives encourageantes dans la mesure où les ventes et les achats de gaz entre les deux pays se font sur la base de contrats à long terme, et n’ont pas été émaillés de différends majeurs. Or, la question qui reste sujette à débat est dans quelle mesure la Sonatrach peut-elle livrer plus de gaz à court terme. Le communiqué de la Sonatrach qui a conclu la visite du P-DG d’Eni a d’ailleurs évoqué un engagement qui s’inscrit plus dans le moyen et le long termes. Et en ce sens les estimations divergent. Certaines sources parlent d’une hausse des livraisons de 2 milliards de m3 à court terme. De son côté, le bureau d’Alger de l’agence Reuters a indiqué hier que la Sonatrach devrait fournir à l’Italie au maximum 4 milliards de mètres cubes supplémentaires de gaz naturel par an, en se référant à une source de l’industrie. Et c’est dans l’objectif de permettre à l’Algérie d’augmenter ses capacités de production pour faire face à la demande locale croissante et de dégager plus d’excédents à l’export que l’accord stratégique qui doit être signé aujourd’hui doit être global et multiforme. Il ne se limitera pas à la question des approvisionnements gaziers, mais touchera d’autres domaines de coopération notamment sur le plan technique afin d’améliorer les rendements des puits avec l’amélioration des techniques de remplissage. Il s’agira de l’accompagnement dans l’amont pétrolier et gazier d’autant plus que Sonatrach prévoit des investissements de 40 milliards de dollars d’ici 2026, dont 8 milliards de dollars en 2022. Sonatrach et Eni travaillent d’ailleurs en association sur une douzaine de projets et ont très récemment annoncé une découverte majeure dans le bassin de Berkine. Un puits dont le potentiel laisse entrevoir une production de 7000 barils/jour d’huile et de 140.000 m3/jour de gaz associé. Les deux partenaires avaient d’ailleurs signé un accord d’investissement pour ce projet de 1,4 milliard de dollars en décembre 2021, et ils comptent mettre ce puits en production dès le troisième trimestre 2022, grâce à un développement « fast track ».

Samira Ghrib

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