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Prisonniers de Gdeim Izik : L’ONU condamne le Maroc pour faits de torture

Le Comité des Nations unies contre la torture (CAT) a condamné le Royaume du Maroc pour faits de torture et de mauvais traitements, sur le prisonnier sahraoui du groupe de Gdeim Izik, Mohamed Bourial, l’appelant à « indemniser équitablement » le détenu et à « ouvrir une enquête impartiale » pour juger les tortionnaires. Mohamed Bourial, né en 1970 au Sahara occidental, a été arrêté le 8 novembre 2010, le jour où les forces marocaines ont démantelé sauvagement le campement de Gdeim Izik, qui comprenait environ 6.500 tentes installées par des Sahraouis un mois plus tôt pour protester contre les mauvaises conditions socio-économiques au Sahara occidental occupé par le Maroc depuis 1975. Il affirme être victime de violations par le Maroc de ses droits protégés au titre des articles 1, 2, 11, 12, 13, 14, 15 et 16 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le détenu sahraoui « a été victime de torture, il doit être indemnisé de façon adéquate et équitable, y compris avec les moyens nécessaires à une réadaptation la plus complète possible, et recevoir un traitement de réhabilitation », selon la décision adoptée par le CAT en vertu de l’article 22 de la Convention, concernant la communication n 923/2019 relative à la plainte de Mohamed Bourial, déposée par l’avocat de la défense du groupe Gdeim Izik, Olfa Ouled. Le Comité appelle également Rabat à l' »ouverture d’une enquête impartiale et approfondie sur les événements en question (torture et mauvais traitements), conformément au protocole d’Istanbul, pour juger les tortionnaires et les responsables » de ces faits. Il exhorte aussi les autorités d’occupation marocaines à « mener une enquête immédiate et effective concernant les allégations de représailles dénoncées par le requérant (Bourial) et à s’abstenir de tout acte de pression, d’intimidation ou de représailles susceptible de nuire à l’intégrité physique et morale du prisonnier, qui constituerait autrement une violation des obligations du Maroc au titre de la Convention de coopérer de bonne foi avec le Comité pour l’application des dispositions ». Le détenu Mohamed Bourial doit « recevoir la visite d’un médecin de son choix, recevoir la visite de sa famille et de son avocat et être transféré dans une prison plus proche de sa famille » au Sahara occidental occupé, recommande le CAT. Et de préciser dans ce sens que « le Maroc dispose de 90 jours à compter de la date de la décision pour l’informer des mesures qu’il aura prises pour donner suite aux observations ci-dessus ». « Si le Maroc ne se conforme pas à la décision du CAT, il viole son engagement envers la Convention contre la torture et le protocole additionnel à la convention, qui ont tous deux été ratifiés par le Royaume », avertit-il. Dans sa requête, le plaignant Mohamed Bourial indique, entre autres, qu’il a été soumis à de mauvais traitements pendant sa détention, sans accès à un médecin de son choix en dépit de son mauvais état de santé, a été placé en conditions d’isolement et a été privé de recevoir régulièrement la visite de sa famille. En outre, le détenu de Gdeim Izik a indiqué que sa condamnation était uniquement fondée sur des aveux obtenus par la torture alors même qu’il affirme n’avoir rien avoué, mais avoir été contraint d’apposer sa signature sur un document dont il ne connaissait pas le contenu, alors qu’il était menotté et avait les yeux bandés. En ne procédant à aucune vérification et en utilisant de telles déclarations dans la procédure judiciaire contre le requérant, le Maroc a manifestement violé ses obligations au regard de l’article 15 de la Convention. Depuis, de nombreux appels ont été lancés par des organisations internationales, des militants et des activistes pro-sahraouis étrangers pour la libération des détenus politiques sahraouis qui font l’objet de traitements « cruels et inhumains » dans les prisons marocaines.

Dans ce sens, deux associations solidaires avec la cause sahraouie se sont félicitées, hier, de la décision du CAT, soulignant que la libération des prisonniers politiques sahraouis était une décision qui s’impose. Dans un communiqué conjoint, l’Association des amis de la RASD-France et la Ligue de protection des prisonniers politiques sahraouis se félicitent « de la décision du Comité contre la torture de l’ONU à Genève, concernant un prisonnier politique du groupe de Gdeim Izik ». « Avec cette décision, le CAT condamne le royaume du Maroc pour faits de torture sur Mohamed Bourial, arrêté le 8 novembre 2010, le jour du démantèlement du campement pacifique de protestation de Gdeim Izik dans la banlieue de Laâyoune au Sahara occidental. Il a été condamné à l’issue de deux procès inéquitables, dont le premier par une Cour militaire en 2013 et confirmé en appel en 2017, à 30 ans de prison », peut-on lire dans le communiqué. « C’est la troisième fois que cette haute instance de l’ONU condamne le Maroc », souligne le texte, faisant savoir que « la première décision concernait Naâma Asfari, lui aussi prisonnier du groupe de Gdeim Izik, prise le 16 novembre 2016 suite à une communication de la plainte déposée le 4 mars 2014 (et) la deuxième concernait Omar N’dour prise (..) le 19 novembre 2021, pour une communication de plainte déposée le 28 novembre 2014 ».  La même source rappelle que depuis l’arrestation des prisonniers de Gdeim Izik, « les associations solidaires n’ont cessé de dénoncer les conditions d’incarcération des prisonniers et les procès inéquitables de 2013, procès militaire et procès en appel de 2017, qui ont condamné les prisonniers à des peines allant de 20 ans à la perpétuité », citant, entre autres, Amnesty International, Human Rights Watch et le Groupe de Genève. Ces condamnations, ajoutent les deux associations, « ont été faites sur la base d’aveux extorqués sous la torture, ce que le droit international ne reconnait pas comme preuve ». « Avec ces décisions, le CAT dénonce ces tortures et a condamné le Maroc par trois fois depuis 2016. 

R.N.

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