Les symboles de la résistance doivent avoir leur juste part dans les œuvres cinématographiques
À l’occasion de l’ouverture des Assises nationales sur le cinéma qui se sont dimanche et hier au Centre international de conférences Abdelatif-Rahal à Alger, le président de la République algérienne, Abdelmadjid Tebboune, a prononcé un discours marquant dans lequel il a réaffirmé la place centrale du cinéma dans la construction mémorielle et identitaire du pays. Le chef de l’État a particulièrement insisté sur la nécessité de représenter à l’écran les grandes figures historiques de la résistance algérienne et de la guerre de libération nationale. « Tous les moyens ont été mobilisés pour la production d’un film à la hauteur du symbole de l’Algérie et de la résistance populaire, l’Emir Abdelkader », a déclaré le président Tebboune, avant d’énumérer d’autres figures historiques qui méritent selon lui leur place sur grand écran : « Tous nos leaders parmi les chefs de la résistance populaire Cheikh Bouamama, Cheikh El-Mokrani, Fatma N’Soumer, Boubaghla ainsi que Benacer Benchohra et les Ouled Sidi Cheikh, et les chefs de la glorieuse Guerre de libération, y compris ceux qui ne sont pas connus du public, doivent avoir leur juste part dans la production cinématographique ». Le président de la République a souligné que « tout évènement lié à la Révolution peut faire l’objet » d’un film cinématographique. Dans son allocution, le président Tebboune a rappelé l’héritage historique du cinéma algérien, né selon ses mots « de la matrice de la glorieuse Révolution ». Il a rendu hommage aux pionniers du secteur, soulignant que le cinéma algérien « est l’œuvre de femmes et d’hommes qui se sont mobilisés pour la patrie avec un engagement révolutionnaire ». Le chef de l’État a notamment mis en avant le rôle du cinéma dans la documentation des « souffrances du peuple algérien tout au long des 132 ans » de colonialisme, ainsi que son importance dans la représentation des évolutions plus récentes du pays, citant notamment le Hirak « qui a impressionné le monde, sans aucune effusion de sang durant plusieurs mois de marches pacifiques ». S’adressant directement aux professionnels du secteur présents aux Assises, le président a affirmé le principe de liberté de création, tout en posant certaines limites : « la création est libre et vous disposez de la liberté absolue dans vos créations artistiques sauf ce qui vise l’Algérie et porte atteinte aux valeurs de la société et des constantes de la nation ». Il a également évoqué les récentes initiatives gouvernementales en faveur du secteur, notamment la création, « pour la première fois depuis l’indépendance », de lycées artistiques destinés à « former des talents artistiques de haut niveau et instaurer un climat culturel permettant à notre pays de passer à une autre étape ». Le président a par ailleurs souligné le potentiel économique du secteur, qu’il a décrit comme « capable de créer des milliers d’emplois ». Ces orientations présidentielles ont été saluées par de nombreux professionnels du secteur. Le cinéaste Ahmed Rachedi a notamment qualifié ces assises d' »initiative très appréciable », soulignant la « bonne organisation et une présence de haut niveau » qui témoignent selon lui d’une « forte volonté politique de booster ce secteur ». Rachedi a rappelé le rayonnement international du cinéma algérien « dans les années 1970 et 1980 », avec des œuvres qui s’étaient distinguées par leur ancrage dans « l’Algérie et ses spécificités culturelles », représentant à l’époque « des œuvres nouvelles pour le cinéma mondial ». Le réalisateur s’est également montré optimiste quant aux perspectives offertes par les « changements technologiques en cours » qui permettront selon lui de dynamiser le secteur, notamment à travers « la création de nouvelles plateformes dédiées aux films, telles que les chaînes de télé, le streaming, ainsi que les technologies de projection de films dans les grandes salles de cinéma ». Pour sa part, le réalisateur Mounes Khammar a qualifié d' »historique » le discours présidentiel, saluant « sa forte volonté de relancer le secteur du cinéma dans une démarche qualifiée de révolutionnaire » ainsi que « son engagement et celui de l’État à promouvoir ce secteur ». Le réalisateur et producteur Belkacem Belhadj s’est également félicité de l’intérêt présidentiel pour le secteur, relevant l’appel du chef de l’État aux professionnels à « s’organiser » pour développer l’industrie cinématographique. Ces Assises nationales sur le cinéma s’inscrivent dans une démarche plus large de réforme et de modernisation du secteur cinématographique algérien. Elles visent à élaborer une feuille de route opérationnelle pour le développement d’une industrie cinématographique moderne et compétitive, en phase avec les défis contemporains du secteur. Cette initiative intervient dans un contexte de renouveau institutionnel, marqué notamment par la promulgation en 2024 d’une nouvelle loi sur l’industrie cinématographique. Les participants aux Assises ont d’ailleurs souligné l’importance de ce cadre législatif, tout en relevant les défis qui persistent en termes de financement, d’infrastructures et de formation professionnelle. L’événement témoigne ainsi d’une volonté politique forte de replacer le cinéma au cœur du projet culturel national, tout en l’inscrivant dans une perspective de développement économique et de rayonnement international.
M.S.