Alger manifeste son étonnement face aux mesures de restrictions annoncées par Paris: « On ne cèdera pas ! »
Alger a réagi hier et manifesté sa profonde surprise et son étonnement concernant des mesures de restriction de circulation et d’accès au territoire français annoncées par le gouvernement français à l’encontre de ressortissants algériens détenteurs de documents de voyage spéciaux normalement exemptés des formalités de visas.
Le ministère des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, a affiché dans un communiqué officiel, la surprise et l’étonnement de l’Algérie face aux restrictions annoncées par le Quai d’Orsay. « Le Ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères a fait état de mesures de restriction de circulation et d’accès au territoire français prises à l’encontre de ressortissants algériens titulaires de documents de voyage spéciaux les exemptant de formalités de visas », lit-on dans le communiqué. Le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères a effectivement annoncé ces restrictions, mais le gouvernement algérien déplore n’avoir été aucunement informé de ces décisions, contrairement aux dispositions de l’article 8 de l’accord algéro-français qui prévoit une exemption réciproque de visas pour les détenteurs de passeports diplomatiques ou de service. Les autorités algériennes précisent n’avoir connaissance que de deux cas spécifiques survenus récemment. « Le Gouvernement algérien exprime sa surprise et son étonnement quant à cette annonce dont il n’a été aucunement informé comme le commandent les dispositions de l’article 8 de l’accord algéro-français en matière d’exemption réciproque de visas pour les détenteurs de passeports diplomatiques ou de service », ajoute la même source, précisant que les autorités algériennes « n’ont aucune connaissance de pareilles mesures restrictives à l’exception de deux cas précis intervenus sur la période récente ». « Le premier cas, sur demande d’explications algérienne, a fait l’objet d’expression de regrets de la part des autorités françaises et a été qualifié d’incident malheureux dû à une rupture dans la chaîne de commandement. Le deuxième cas intervenu très récemment fait l’objet actuellement d’une même demande d’explications adressée aux autorités françaises », souligne également le texte du ministère. L’Algérie considère que cette annonce, dont elle n’a pas été officiellement informée, s’inscrit dans une longue série de provocations, d’intimidations et de menaces dirigées contre le pays.L’annonce de ces mesures dont l’Etat algérien « n’a pas été informé s’inscrit dans la longue liste des provocations, des intimidations et des menaces dirigées contre l’Algérie. Celles-ci sont de nul effet sur notre pays qui n’y cèdera pas. Toute mesure attentatoire à ses intérêts fera l’objet de mesures réciproques, strictes et immédiates ». « L’Algérie est manifestement devenue l’enjeu de querelles politiques intra françaises où tous les coups bas politiciens sont permis dans le cadre d’une compétition, dont l’extrême droite est l’instigateur, le référant et le donneur d’ordres. Cette dynamique qui entraine dans son sillage, non seulement des forces politiques françaises, mais également des membres du gouvernement français, peut avoir des conséquences incalculables sur la relation algéro- française dans toutes ses dimensions », conclut le communiqué. Il faut dire que l’Algérie fait l’objet d’une campagne hostile et féroce sur fond d’enjeux électoraux liés à la présidentielle en France prévue en 20207. Une campagne alimentée par l’extrême droite, mais qui entraîne également plusieurs acteurs politiques de droite y compris des membres du gouvernement à l’image du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau qui ne cache plus ses ambitions politiques, mais aussi le premier ministre François Bayrou sur la sellette et secoué par un gros scandale politico-judiciaire. Cela a créé une surenchère injustifiée en France qui pourrait avoir des conséquences incalculables sur les relations algéro-françaises dans toutes leurs dimensions. Ces tensions s’inscrivent dans un contexte historique marqué par de nombreux différends entre la France et l’Algérie. Depuis l’indépendance algérienne en 1962, les relations entre les deux pays ont connu plusieurs crises diplomatiques liées à la question mémorielle de la colonisation et de la guerre d’indépendance. La France a mené diverses actions hostiles contre l’Algérie, notamment des opérations de déstabilisation politique, des pressions économiques et des tentatives d’ingérence dans les affaires intérieures. Les attaques françaises contre l’Algérie ont pris différentes formes au fil des décennies, allant des campagnes médiatiques négatives aux restrictions économiques, en passant par des déclarations politiques controversées remettant en question l’histoire et l’identité nationale algérienne. Les menaces ont également inclus des tentatives de limitation de l’influence algérienne sur la scène internationale, particulièrement en Afrique et dans le monde arabe. Les contentieux mémoriels non résolus concernant la période coloniale et les essais nucléaires français dans le Sahara algérien demeurent des points de friction majeurs. L’instrumentalisation régulière de la question algérienne dans le débat politique français, particulièrement lors des campagnes électorales, contribue à l’exacerbation périodique des tensions bilatérales. Cette nouvelle crise diplomatique s’illustre néanmoins par sa gravité et la nature des attaques teintées de racisme, de suprémacisme et de velléités néocoloniales. Des tensions qui s’exacerbent depuis l’été dernier et le soutien apportée par Paris aux plans coloniaux du Maroc au Sahara occidental et qui sont alimentées par une succession de de provocations depuis et qui risquent donc d’aggraver une situation déjà fragile et de compromettre davantage les efforts de normalisation des relations entre les deux pays qui partagent pourtant des liens historiques, culturels et humains.
Hocine Fadheli